Une crise arabe « étranglée » : l’affaire du Yémen
L’incessante répétition des crises arabes déconcerte et finit par lasser, à la seule exception de quelques « spécialistes » épris des complexités orientales, les observateurs de la politique étrangère. Ne voit-on pas en effet, de façon habituelle, ces crises se résorber plutôt que se résoudre ? Ne doit-on pas constater, le plus souvent, que leurs soubresauts et leurs rebondissements s’annulent ? À leur terme, généralement imprécis, la ligne des événements reprend sa traditionnelle allure d’arabesque, comme si rien de fondamental n’avait été affecté par ces tempêtes véhémentes et peut-être superficielles. Il ne reste qu’un théâtre immuable, sur lequel des acteurs passagers se sont vainement agités.
Il n’est pas du tout certain que la crise du Yémen doive échapper à ces remarques sceptiques. Cependant, elle avait débuté dans un style nouveau, prometteur de bouleversements radicaux. Selon toute probabilité, elle n’aura néanmoins constitué qu’un essai manqué, ou qu’une tentative stérile, car sa logique révolutionnaire a été contrariée par des influences extérieures d’une efficacité inattendue.
Ce serait assez pour que cette crise justifie quelques réflexions : s’il existe désormais une « technique » d’étranglement des crises arabes, le fait vaut d’être relevé. Mais peut-être faut-il aller plus loin : les protagonistes d’une entreprise déjouée de la sorte risquent de ressentir la crainte d’avoir été frustrés. Ne seront-ils pas tentés de projeter ailleurs, de façon plus redoutable, des énergies dont l’échec artificiel leur aura paru immérité ? Si le médecin a coupé la fièvre, triomphant ainsi du symptôme, il n’a pas traité le mal profond que cet indice commençait à révéler. Un apaisement artificiel procure une fausse sécurité, plus dangereuse que les effets destructeurs de dramatiques soubresauts.
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