Rapports économiques et politiques dans les démocraties populaires (I)
L’Europe occidentale a bougé en 1962. La France a reconnu l’indépendance de l’Algérie et le gaullisme a spectaculairement consolidé ses positions ; l’Italie a commencé l’expérience de l’« ouverture à gauche » ; le gouvernement britannique s’est davantage engagé dans la voie de l’association à l’Europe, et en Allemagne fédérale s’est notablement dégradée l’autorité du vieux chancelier. À l’Est, l’U.R.S.S. a envisagé et partiellement opéré une modification de son organisation économique, confirmé sa politique de déstalinisation, et à l’occasion de l’affaire de Cuba a effectué une prise de position en net retrait sur ses intransigeances antérieures, tandis que s’accentuaient ses divergences avec la Chine populaire et l’Albanie. L’Europe centrale et orientale placée sous obédience soviétique a-t-elle subi, elle aussi, une évolution génératrice de changements dans les rapports entre les États satellites et avec le Kremlin lui-même ? (1) Bien que dans les démocraties populaires plus encore qu’ailleurs, en l’absence de débats ouverts et d’élections véritables, les faits économiques et les événements politiques soient étroitement liés, nous envisagerons séparément ces deux aspects de leur actualité.
Les rapports économiques
Les rapports économiques ont été affectés par deux facteurs dépendant étroitement de Moscou, d’une part l’activité du Comecon (Conseil pour l’assistance économique mutuelle), d’autre part l’attitude soviétique à l’égard du Marché commun.
Laissé dans l’assoupissement après sa création en janvier 1949 et doté de plus grandes responsabilités seulement après les événements de Pologne et de Hongrie en 1956, le Comecon s’est efforcé de faire passer dans la pratique la politique de coordination, d’harmonisation et d’intégration économique qui devait permettre d’associer les économies des démocraties populaires à celle de l’U.R.S.S. d’une façon rentable et irréversible. En fait, après cinq années de mise en vigueur, les résultats de la planification établie au cours des réunions tenues périodiquement dans les diverses capitales satellites, ont été assez loin de répondre aux espoirs exprimés. Les plans quinquennaux, qui tous tendaient à rattraper l’Occident quant à la productivité et le niveau de vie, avaient été dans l’ensemble synchronisés pour la période 1961-1965 ; l’orientation de la production industrielle et agricole avait subi effectivement dans chaque État des modifications conformes aux prévisions initiales, les courants commerciaux ayant été davantage « polarisés » en fonction des besoins du bloc socialiste et de l’aide promise aux pays sous-développés.
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