Renaissance des libertés économiques et sociales
Il y a quelques mois paraissait sous la plume de François Bloch-Lainé et sous le titre Pour une Réforme de l’entreprise un livre qui fit grand bruit.
Renaissance des libertés économiques et sociales, pensé par une équipe mais rédigé par Pierre de Calan, se présente devant l’opinion comme une réponse éclairée à ce livre, même si les deux ouvrages furent conçus à peu près en même temps. C’est donc de la littérature « engagée » et quiconque veut se faire une opinion ne manquera pas de lire ces deux livres attachants afin de les confronter : ils émanent d’ailleurs de deux auteurs sympathiques, intelligents, grands réalisateurs et par surcroît bons amis.
Ce qui est en jeu, c’est d’abord le destin de l’entreprise privée en tant qu’institution, mais bien au-delà de la conception même de l’économie et de l’éthique quotidienne de la société occidentale. Le mérite de Pierre de Calan est sans doute, en partant des critiques formulées par François Bloch-Laîné sur les conditions de gestion des entreprises, notamment industrielles, et des réformes suggérées par l’auteur, d’avoir su élever le débat du plan technique au plan philosophique.
Si l’on se réfère à une philosophie personnaliste, la liberté ou plutôt les libertés forment un tout. L’existence d’une possibilité d’appropriation privée des richesses est indispensable à leur exercice. L’appropriation privée des moyens de production ne peut être détachée sans risque de celle de tout autre élément de patrimoine. Responsables du fait de ce patrimoine devant les autres personnes qui composent la société humaine, les propriétaires reconnus ne peuvent faire autrement que d’assumer en dernier ressort le commandement des entreprises, même s’il leur arrive de déléguer leurs pouvoirs à la caste des « dirigeants ». Tout autre système diminue en fait l’efficacité de l’appareil de production qu’il tend à éloigner de la vérité économique et conduit à l’arbitraire de la tyrannie technocratique derrière laquelle se cache la tyrannie politique.
En conclusion, Pierre de Calan montre que la véritable « démocratie économique » (il n’hésite pas à reprendre le terme) passe par la reconnaissance du droit de propriété et la défense de l’entreprise privée, source d’initiative et de progrès et non par la socialisation des moyens de production, comme le croit trop souvent une opinion abusée par « l’illusion technocratique ».
Se défendre en attaquant a toujours été la marque d’une heureuse stratégie. C’est celle qu’a choisie M. de Calan et qu’il a appliquée avec art : c’est aussi dire que certaines de ses positions pourraient être discutées et le seront. Souhaitons que de ce grand débat l’entreprise sorte rajeunie puisque, privée ou d’État, elle demeure par la valeur de ses chefs la source de tout développement économique. ♦