Pour une politique scientifique
La science nous a révélé un monde nouveau dont quelques explorateurs ont vaguement défini les contours et précisé quelques îles, caps et promontoires. Mais nous savons qu’au-delà de nos connaissances actuelles, il en est d’autres que nous pressentons, à la recherche desquelles il faut aller dans des expéditions organisées, dirigées, coordonnées. La recherche scientifique prépare et lance ces expéditions. Nul doute qu’il ne doive résulter des découvertes à venir des bouleversements complets de nos conceptions. À ces bouleversements, il importe que les hommes politiques puissent faire face, puisqu’ils ont la charge de la cité dans l’immédiat, mais aussi dans ses développements futurs. La « politique scientifique » n’est donc pas seulement une prise de conscience des besoins financiers, matériels et humains de la recherche. C’est beaucoup plus que cela, car c’est une rénovation de la politique – ce terme pris dans son sens le plus noble – en vue d’affronter les temps prochains.
Telle pourraient être, nous semble-t-il, l’essence de ce livre et sa leçon. Le sujet, comme on le voit, mérite attention, étude et réflexion, et l’ouvrage est loin de l’épuiser. Les auteurs écrivent que leur livre est « certainement prématuré » ; nous ne partageons pas leur opinion ; tout ce qui ouvre l’esprit et l’oriente vers de nouvelles et larges perspectives est toujours actuel et nécessaire. Christophe Colomb, bien qu’il ait cru jusqu’à sa mort qu’il avait découvert une nouvelle route vers l’Asie, et non un nouveau continent, n’a pas eu une action « prématurée » : il a montré une voie.
Les auteurs ont divisé leur ouvrage en trois parties d’importance inégale. Dans la première, résident l’intérêt essentiel et l’originalité de leur propos, car elle traite de la science et de la recherche scientifique dans le monde moderne, et de ses relations avec la politique. Dans la seconde, sont étudiés les efforts faits en France « en faveur d’une structuration libérale » de la recherche. Dans la dernière enfin, on trouve une analyse schématique des organisations réalisées dans les principaux pays.
On s’attachera certainement à ce travail qui donnera large matière à réflexion. ♦