Crise aigüe en Arabie du Sud
Composante habituelle, depuis plusieurs années, de la chronique tumultueuse des crises arabes (1), l’affaire de l’Arabie du Sud a revêtu, durant ces derniers mois, un caractère de gravité si aigu qu’il paraît nécessaire de lui accorder aujourd’hui une toute particulière attention. Aux yeux de maint observateur, cette question constitue désormais le plus redoutable élément de trouble dans le monde arabe, supplantant même, dans l’ordre d’urgence et d’importance des dangers, le classique conflit de Palestine.
La Grande-Bretagne a en effet, rappelons-le, résolu d’octroyer en 1968 l’indépendance à la Fédération de l’Arabie du Sud, ensemble formé par les anciennes entités de la colonie d’Aden et du Protectorat occidental ; mais elle ne veut ni partir en laissant le chaos derrière elle, ni conserver sur place d’onéreuses responsabilités de défense ; elle a donc tenté d’équilibrer, au sein du gouvernement fédéral, les tendances nationalistes d’Aden par l’influence traditionaliste des sultans de l’ancien Protectorat, sans réussir cependant à faire ainsi le faisceau de toutes les forces politiques : les éléments les plus avancés se sont dérobés, ils ont reçu l’appui de la République Arabe Unie et du gouvernement républicain du Yémen, et ils mènent contre la Fédération et contre les Britanniques une violente action, qui ne recule pas devant l’emploi du terrorisme.
Le Caire et Sanaa contestent, en effet, tout caractère représentatif à l’actuel gouvernement fédéral ; ils considèrent, d’ailleurs, l’Arabie du Sud comme une partie indûment occupée, du territoire yéménite ; ils estiment que l’indépendance promise par les Britanniques ne serait qu’un trompe-l’œil. Riadh, tout au contraire, verrait avec faveur un État arabe modéré s’établir à l’extrémité méridionale de la péninsule. La crise de l’Arabie du Sud apparaît, de la sorte, non seulement comme une difficile question de décolonisation, mais encore comme un épisode aigu du conflit interarabe qui oppose le camp « progressiste » et le camp « conservateur ».
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