Pourquoi une Marine
L’absence de courant d’intérêt permanent pour les choses de la mer dans un pays ouvert sur le large comme le nôtre est un phénomène de « psychologie nationale » sans équivalent en Europe. Arrondir le patrimoine foncier par la conquête patiente des enclaves étrangères, reculer et défendre les bornes du champ, telle est, il est vrai, l’ambition séculaire du paysan.
Le Français est de cette race ; rien naguère ne le poussait hors de ses horizons familiers puisqu’il trouvait l’aisance dans l’exploitation traditionnelle d’une terre féconde. Aussi la France eut-elle volontiers regardé ses voisins, moins favorisés par la nature, découvrir et conquérir les continents nouveaux, courir sans elle l’aventure maritime des temps modernes si elle n’avait été entraînée à son tour par le poids même de sa richesse et de son influence, par sa place en Europe et par l’ambition de quelques-uns de ses fils.
On ne change pas la psychologie d’un peuple en quelques années. Aujourd’hui encore, sorti du cercle étroit des hommes de métier, on ne rencontre le plus souvent à l’égard des problèmes maritimes qu’une certaine indifférence n’excluant pas, tant s’en faut, des opinions tranchées, dont on pourrait dresser le « sottisier ». Comment aurions-nous d’ailleurs une politique maritime, comment la mer aurait-elle sa véritable place dans les préoccupations nationales, alors que les responsabilités en la matière restent dispersées sans coordination réelle à travers plusieurs ministères ?
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