Maritime - Allemagne fédérale : situation de la Marine - France : construction des corvette C 67 ; missions et attributions du centre amphibie
Allemagne fédérale (RFA) : Situation de la Marine
La politique de défense en Allemagne fédérale est régie par un certain nombre de principes de base ; elle est de plus soumise à des limitations dans le domaine nucléaire résultant des Accords de Paris.
Le premier de ces principes de base est l’intégration totale des forces armées à l’Otan sur le plan opérationnel conformément aux engagements pris lors de la signature des traités. Seules sont placées sous commandement allemand, en temps de paix comme en temps de guerre :
– la logistique des forces armées dont l’organisation et les dépôts sont purement nationaux ;
– la défense territoriale chargée d’assurer sur le territoire fédéral la sécurité des arrières des armées alliées.
La stratégie adoptée dans le cadre de l’Alliance est celle dite de « l’avant » qui est destinée à protéger l’intégrité du territoire de la République. Cette stratégie cependant requiert une capacité de riposte flexible de façon à rester adaptée au caractère de l’agression.
Si les Accords de Paris interdisent à la RFA de fabriquer des armements nucléaires, elle a pu, par contre, arriver à l’emploi de ces armes sous le régime de la double clef. L’armement nucléaire est réalisé dans les armées de terre et de l’air. Il l’est partiellement dans la marine par l’intermédiaire de l’aéronautique navale.
Le ministre fédéral de la Défense est responsable de l’instruction, de l’armement et de la mise en condition des forces armées. Il détient le pouvoir de commandement en temps de paix ; il le transfère au Chancelier dès la proclamation de l’état d’urgence.
En cas d’agression extérieure, le commandement des forces armées fédérales affectées à l’Otan est assuré par les autorités militaires de l’Alliance sans préjudice de la responsabilité politique générale du gouvernement et du transfert de pouvoir de commandement au Chancelier.
Le ministre de la Défense est assisté d’un Secrétaire d’État et d’un Secrétaire d’État parlementaire chargé des missions d’information et de liaison auprès du Parlement.
Le ministère est articulé en trois divisions principales et deux divisions :
– la division principale des « Affaires militaires » ;
– la division principale des « Affaires d’armement » ;
– la division principale des « Affaires administratives » ;
– la division « Budget » ;
– la division « Personnel ».
La division des « Affaires militaires » est dirigée par l’Inspecteur général. Celui-ci est assisté d’un « Conseil de direction militaire » qui groupe les Inspecteurs des trois armées et le Commandant des forces territoriales. L’Inspecteur général a autorité sur les commandements subordonnés par l’intermédiaire de l’État-major des forces armées.
Dans l’Otan et le cadre général ainsi défini, la marine a pour mission de défendre la République fédérale contre des attaques navales, de fournir une contribution efficace à la défense des accès à la mer Baltique, d’assurer les voies de ravitaillement vitales et d’appuyer les opérations terrestres menées dans la région côtière. Il lui appartient d’autre part de sauvegarder sur mer les droits de la République et de protéger la navigation nationale contre des empiétements éventuels (Livre blanc sur la défense 1969).
Son théâtre d’opérations comprend la Baltique, le Kattegat, le Skagerrak et la partie orientale de la mer du Nord.
Par les Accords de Paris et certaines modifications qui leur ont été depuis lors apportées, la Bundesmarine n’est pas autorisée à construire des navires de guerre autre que défensifs. Il lui est interdit de posséder :
• des navires de combat de plus de 3 000 tonnes à l’exception de :
– huit destroyers équipés d’engins tactiques de défense dont le tonnage ne doit pas dépasser 6 000 t,
– un navire-école de 4 500 à 5 000 t,
– des sous-marins d’un déplacement supérieur à 450 t, sauf six bâtiments d’un déplacement maximum de 1 000 t ;
• des navires auxiliaires de plus de 6 000 t.
Compte tenu de ces restrictions, le gouvernement allemand s’est efforcé, depuis la création en 1955 de la Bundesmarine, d’adapter ses moyens aux missions que l’Otan lui impose dans le cadre très particulier du théâtre d’opérations précité. Celui-ci requiert essentiellement des bâtiments légers de surface et des sous-marins appuyés par l’aviation navale. Un vaste programme à réaliser d’ici 1970 a été mis sur pied. Il prévoyait à cette époque une flotte de 280 bâtiments de combat et logistiques armés par 43 000 hommes. Pour des raisons budgétaires et aussi à cause de divergences dans les caractéristiques à donner à certaines catégories de bâtiments, ce programme a dû être étalé dans le temps, sinon réduit. C’est ainsi que l’on a momentanément renoncé à commander aux États-Unis trois destroyers lance-missiles supplémentaires et qu’aucune décision n’a été prise en ce qui concerne la construction des sous-marins de 1 000 t.
La mise en chantier de douze sous-marins de 400 t type 207 a été retardée malgré une décision favorable du Bundestag en 1966. De même la construction de dix vedettes lance-missiles Tartar de 300 t a été repoussée à 1972-1974. La refonte de dix vedettes type Jaguar en vedettes lance-missiles a été par ailleurs abandonnée.
En faisant abstraction des unités anciennes et des navires-écoles, sont présentement en service :
– 4 destroyers de 3 400 t, classe Hamburg ;
– 6 escorteurs rapides de 1 750 t, classe Köln ;
– 5 vieux destroyers ex-américains du type Fletcher de 2 050 t ;
– 42 vedettes rapides lance-torpilles dont 40 appartiennent au type Jaguar de 190 t particulièrement réussi ;
– 9 sous-marins de 350 à 370 t ;
– 18 dragueurs côtiers dont 6 construits en France ;
– 31 dragueurs rapides ;
– 6 ramasseurs de torpilles qui ne sont en réalité que des escorteurs côtiers modernes et bien équipés ;
– 19 patrouilleurs modernes de 150 à 230 t et plusieurs petits bâtiments de débarquement.
À ces unités de combat, il faut ajouter une flotte logistique et auxiliaire nombreuse parfaitement adaptée à sa mission. Cette flotte, une des plus modernes qui soit, a été essentiellement conçue pour constituer en cas de crise hors d’Allemagne, des bases mobiles de repli, les bases normales de la flotte étant trop exposées aux coups de l’ennemi potentiel. Le plus beau fleuron de cette flotte est une classe de seize petits ravitailleurs de 2 300 t adaptés au soutien soit des sous-marins, soit des dragueurs, soit enfin des vedettes rapides. Ces bâtiments, comme les destroyers classe Hamburg et les escorteurs rapides type Köln, sont équipés de notre excellent canon de 100 antiaérien.
Les constructions en cours ou décidées portent sur :
– 3 destroyers lance-missiles Tartar de 4 500 t du type Charles F. Adams en construction aux États-Unis : Lutjens, Molders et Rommel. Le premier est en essais. Les trois auront rallié la flotte fin 1970 ;
– 4 corvettes de 2 000 t équipées d’un lance-missiles Tartar et de canons de 76 italiens. Après de nombreux ajournements, la Commission des finances du Bundestag a finalement donné, le 23 janvier dernier, son aval à la mise en chantier de ces bâtiments qui avait été approuvée en janvier 1968 par la Commission de la défense ;
– 12 sous-marins type 207 de 400 t dont la Commission des finances a également autorisé la mise sur cale.
Par ailleurs, les unités en service seront modernisées notamment les dix plus récentes vedettes du type Jaguar (les Zobel) qui recevront une artillerie automatique de 76 de fabrication italienne ainsi que des torpilles filoguidées.
L’aéronautique navale de première ligne se compose :
– d’une centaine d’avions d’attaque et d’interception tout temps F-104 Starfighter ;
– de vingt Breguet Atlantic ;
– de quelques hélicoptères anti-sous-marins.
L’organigramme ci-contre, tiré du Livre blanc sur la Défense de 1969, montre l’organisation de la Bundesmarine. L’État-major est installé à Bonn. Il fait partie de la Division des « Affaires militaires ». Il a à sa tête l’« Inspecteur de la Marine ».
Le commandement de la flotte est installé à Flensburg-Murwick. Il étend organiquement son autorité aux forces aéronavales et aux deux divisions maritimes de la Baltique et de la mer du Nord, toutes deux chargées de fournir aux forces les moyens logistiques dont elles ont besoin.
Sur le plan opérationnel, donc vis-à-vis de l’Otan, le Commandement de la flotte est Flag Officer Germany (FOG). Il dépend de COMNAVBALTAP avec les quasi-totalités de ses forces. Ce commandement est le subordonné naval de COMBALTAP, commandement unifié germano-danois, dépendant lui-même de CINC-NORTH. Le poste de COMNAVBALTAP est assuré tous les trois ans alternativement par un officier danois ou allemand. C’est depuis 1968 un amiral allemand qui est à sa tête.
Pour terminer ce rapide aperçu sur la Bundesmarine, disons que ses effectifs se montent à l’heure actuelle à 36 000 hommes dont 3 500 officiers. Environ 16 % de ce total servent dans l’aéronautique navale.
En conclusion, l’on peut dire que cette marine a fait un effort remarquable pour être à même de remplir les missions qui lui ont été confiées par l’Otan. Ce n’est pas son moindre mérite si l’on songe qu’elle a été créée il y a à peine quatorze ans et cela après une interruption de dix ans.
Fière de son passé et de ses traditions, consciente qu’elle doit protéger une flotte marchande qui, avec 7 364 000 t de jauge brute, occupe le 9e rang dans le monde, elle aspire à jouer sur les mers au sein des flottes de l’Otan un rôle plus important que la mission difficile et presque de sacrifice qui lui est confiée en Baltique.
France
Construction des corvettes type C-67
La construction de la première des trois corvettes type C-67 inscrites au 2e plan à long terme est avancée à Lorient. Les travaux préparatoires à la mise sur cale de la deuxième ont été entrepris. La troisième sera mise en chantier dans le courant de l’année prochaine.
Ces bâtiments sont les premiers d’une série appelée à succéder à partir de 1975 à nos escorteurs d’escadre. Les trois premières, la quatrième et peut-être la cinquième unité de cette classe seront dotées pour leur propulsion de turbines à vapeur classiques mais les corvettes ultérieures seront uniquement équipées de turbines à gaz. La première corvette sera lancée en 1972 et admise au service actif en 1973.
Ces corvettes ont été conçues pour participer aux missions de sûreté des sous-marins lance-missiles du type Le Redoutable, et doivent, en outre, pouvoir assurer la protection anti-sous-marine d’une force navale articulée autour de nos deux porte-avions, dans une zone où peut régner une sérieuse menace aérienne.
Leurs caractéristiques sont les suivantes :
• Déplacement : 5 500 t en pleine charge ;
• Dimensions : 152 m (hors tout) x 13,5 m x 5,7 m ;
• Appareil propulsif : 4 chaudières – 2 groupes en turbines développant 58 000 CV – 2 hélices ;
• Vitesse : 31 nœuds en tenue d’opération ; maximale : 32 nœuds ;
• Armement :
– Artillerie : 3 tourelles simples de 100 automatiques antiaériens,
– ASM : 1 rampe pour le lancement d’engins Malafon, 2 catapultes fixes pour le lancement de torpilles, 2 hélicoptères pilotés du type WG13 franco-britannique ;
• Capacité de logement : 26 officiers, 84 officiers-mariniers, 186 quartiers-maîtres et marins.
Les deux hélicoptères seront équipés du MAD (Magnetic Anomaly Detector) qui est un système de détection magnétique des sous-marins. Ils pourront transporter soit des grenades ou des torpilles anti-sous-marines, soit des missiles air-mer pour attaquer les vedettes lance-missiles. Ils pourront être mis en œuvre même par gros temps ; les corvettes type C-67, en effet, seront d’une part stabilisées au roulis, ce qui facilitera l’emploi des armes et des hélicoptères, et, d’autre part, dotées d’un système automatique de saisinage, de rangement ou de sortie du hangar de ces engins.
Un système d’armes surface-surface du type MM38 est actuellement à l’étude et l’on espère qu’il sera prêt suffisamment à temps pour être installé sur la première unité. Ces corvettes ont en outre été conçues pour recevoir à la place d’une des tourelles de 100, un système de missiles antiaériens à courte portée chargé de détruire les engins aérodynamiques lancés par aéronefs, navires de surface ou sous-marins et arrivant sur leur cible à grande vitesse et très basse altitude, quelques mètres au-dessus de l’eau. Pour s’en défendre avec efficacité, il faut d’abord être sûr de les détecter à temps. Aussi a-t-on adopté pour les corvettes type C-67 un radar baptisé V13 à grande cadence d’information utilisant l’effet Doppler. Ce radar permettra la détection par tous les temps d’échos rapides dans un environnement dense d’échos fixes tels qu’il en existe au ras de la mer. Le V13 associé à un système de traitement des informations tactiques permettra une mise en œuvre immédiate des armes de défense aérienne, les 100 d’abord et ultérieurement le système SACP.
La détection sous-marine sera assurée comme sur les frégates classe Suffren, les escorteurs d’escadre T47 refondus ASM, le La Galissonnière et L’Aconit par la combinaison d’un sonar de coque et d’un sonar remorqué à basse fréquence, combinaison qui peut assurer, dans les conditions normales de propagation des ondes sonores, une portée moyenne de détection de l’ordre de 10 000 m environ, portée qui peut être accrue dans des proportions considérables dans certaines conditions.
Le confort de l’équipage sur ces bâtiments a été l’objet d’une attention particulière. Cet équipage a pu être réduit grâce à un automatisme très poussé.
Par leurs caractéristiques, ces corvettes ne le cèdent en rien aux bâtiments similaires en construction ou en projet dans les autres marines, en particulier aux destroyers du type DX de l’US Navy.
Missions et attributions du Centre amphibie
Comme on sait, la Force amphibie d’intervention (FAI) a été dissoute à la fin de l’an dernier, mais dès le 1er décembre 1968 était constitué un Centre amphibie, à caractère interarmées. Ce Centre est implanté à Lorient, là où se trouvait le siège de l’ex-FAI.
Il est commandé par un capitaine de vaisseau qui cumule les fonctions de président de la Commission interarmées des études amphibies et de président de la Commission d’études pratiques des opérations à terre.
Le Centre dispose de quelques petits engins de débarquement et peut compter occasionnellement sur le concours de moyens fournis par la 2e Région maritime.
Il a pour mission :
a) d’étudier les doctrines et principes d’emploi des unités dans les opérations amphibies, de centraliser la documentation relative à leur développement à l’étranger, et de suivre les programmes de construction et l’évolution des matériels amphibies français et étrangers ;
b) d’essayer ou de suivre l’expérimentation des matériels de conception nouvelle afin de déterminer leurs possibilités d’utilisation pour les opérations amphibies telles que :
– Naviplanes,
– Sea lines,
– Matériel de mise à terre de carburant,
– Prolonges de rampes de BDC (Bâtiments de débarquement de chars) ;
c) de former le personnel des bâtiments et engins spécialisés dans les opérations de débarquement qui sont ou seront en service dans la Marine :
– entraînement aux manœuvres de « beaching » et d’enradiage,
– instruction sur les mécanismes élémentaires de la phase amphibie de l’opération de débarquement,
– étude des plans de chargement,
– formation du personnel des équipes :
— de contrôle d’appui de feu naval,
— de plage,
— d’accueil des hélicoptères ;
d) d’organiser, suivant les possibilités, les stages d’information et d’instruction nécessaires pour pouvoir entraîner de façon élémentaire des unités extérieures au Centre à l’embarquement et au débarquement sur plage ;
e) de conserver les archives de l’ancienne FAI et de les tenir à jour grâce aux documents et comptes rendus en provenance des divers bâtiments de débarquement. ♦