Entretien de Claude Delmas avec René Maheu, directeur général de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO).
La crise mondiale de l’éducation
L’U.N.E.S.C.O. (Organisation des Nations-Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture) est une des institutions spécialisées de l’O.N.U., créée au lendemain de la seconde guerre mondiale. Son objectif est de contribuer au maintien de la paix et de la sécurité en resserrant la collaboration entre les nations, afin d’assurer le respect universel de la justice, de la loi, des droits de l’homme et des libertés fondamentales que la charte des Nations-Unies reconnaît à tous les individus. Ses travaux sont considérables et gagneraient à être mieux connus. Certains d’entre eux, certes, souffrent de ne pas paraître insérés dans les préoccupations immédiates des peuples : mais n’est-il pas plus profitable d’étudier les données fondamentales du problème de l’alphabétisation dans tel ou tel pays que de prendre position dans les luttes politiques auxquelles est mêlé ce pays ?
Les Nations-Unies ont décidé que 1970 serait « l’année internationale de l’éducation », cette décision répondant aux conclusions des travaux et à un vœu de l’UNESCO. Nous ignorons encore quel sera le programme de cette « année internationale ». Mais il nous paraît significatif qu’en un temps où les luttes politiques paraissent accaparer l’attention des citoyens, une organisation internationale pose les grands problèmes à une échelle mondiale. D’autant qu’en ce qui concerne l’éducation, les responsables de l’UNESCO n’ont pas attendu les troubles qui ont agité plusieurs pays pour comprendre que certains mécontentements n’étaient que l’expression d’une crise profonde, et qu’au-delà des causes particulières apparaissait une « cause générale » — au sens que Montesquieu donnait à ce terme — à savoir la nécessité, pour nos sociétés, de se renouveler elles-mêmes afin de ne pas être rejetées par une jeunesse qui, demain, en prendra en charge les destinées.
M. René Maheu, Directeur général de l’UNESCO, présente aux lecteurs de la Revue de Défense Nationale quelques-unes de ses idées sur ce problème. Il ne propose certes pas de solutions — tout au plus laisse-t-il entendre qu’il ne suffit plus de prôner, avec Bergson, un « supplément d’âme » pour la technique… La crise de notre monde, c’est celle qui s’exprime par la faim et la malnutrition de millions d’enfants, l’analphabétisme de millions d’hommes, la négation des droits de l’homme dans de nombreuses régions, l’affirmation du « droit de savoir lire » comme une exigence fondamentale en un temps où, dans les sociétés industrielles, les étudiants sont préoccupés par la nature de l’enseignement qu’ils reçoivent et les débouchés que cet enseignement leur offre.
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