La prise du pouvoir mondial
La thèse défendue par Jean Carral avec brio et ingéniosité peut être résumée simplement. Dans un but délibéré de domination économique et politique, les deux grands, États-Unis et URSS, se sont partagé le monde. Leurs méthodes diffèrent. Elles ont nom : capitalisme salarial dans la zone réservée aux États-Unis, servage féodal dans celle attribuée à l’URSS. Le résultat est le même : un sous-développement, consciemment organisé et entretenu, des pays tiers. Pour réussir dans cette entreprise, les deux grands – les monopolistes comme les appelle Jean Carral – sont de mèche. Ils s’entraident. Mieux : ils se concertent. En fait, ils se sont mis d’accord pour que le pouvoir mondial qu’ils ambitionnent soit exercé en commun.
Voilà qui est clair et précis, et on sent que l’auteur souhaite de notre part une adhésion globale et inconditionnelle à tant d’évidence. Aussi, nous propose-t-il une démonstration qu’il estime rigoureuse et sans failles en analysant minutieusement toutes les initiatives prises au cours des 25 dernières années par les deux grands dans des domaines aussi variés que l’industrialisation, l’agriculture, les matières premières, le commerce, le troc, les investissements, la circulation des capitaux, la monnaie, etc., sans oublier l’idéologie, l’euro-dollar et l’euro-rouble. De quoi donner la migraine à un économiste chevronné ou à un ministre des Finances polytechnicien, s’ils voulaient suivie l’argumentation.
Malheureusement, les sources d’information de Jean Carral ne sont ni très diversifiées, ni très sûres, comme nous le laissent croire – en l’absence de toute bibliographie – les renvois au bas des pages, encore que de respectables ouvrages de synthèse, comme ceux de Claude Julien, de Georges F. Kennan ou de François Perroux, y figurent.
Comme il se doit, l’ouvrage de Jean Carral se termine par une vue d’avenir.
Qui mettra fin à l’abominable domination que nous subissons ? Ce ne sont ni les dirigeants complices, ni les syndicats dépassés, ni un sursaut des classes opprimées. C’est la contestation politique à l’échelon des peuples, unis dans un socialisme sur le plan mondial, comme l’a clairement expliqué… Che Guevara.
Ex ungue leonem ! [« Le lion se reconnaît à ses griffes »] ♦