Défense dans le monde - États-Unis : le projet de budget de défense 1975-1976
Le président Ford a soumis au Congrès, le 3 février 1975, le projet de budget fédéral pour l’exercice 1975-1976 (1). À ce projet sont jointes les propositions de budget complémentaire pour l’année budgétaire en cours (FY-75) et de budget de transition pour la période du 1er juillet 1976 au 30 septembre 1976 (2).
Dans le cadre du budget fédéral FY-76 (3), le Pentagone évalue ses besoins à 104,7 milliards de dollars en autorisations d’engagement de dépenses et à 92,8 Md$ en dépenses pour l’année, soit une augmentation de 7 Md par rapport à l’exercice en cours pour ces dernières : la nécessité d’un accroissement sensible des ressources est justifiée par une inflation nationale moyenne de 12 % en 1974, souvent répercutée en hausse au niveau des fabrications d’armements.
Les demandes de l’Administration en dépenses pour l’année – 92,8 Md – représentent :
– 5,8 % du PNB (5,9 en FY-75).
– 25,7 % du budget fédéral (26,1 en FY-75).
– 16,3 % du total des dépenses publiques (16,8 en FY-75).
Sur le plan des personnels, le projet maintient au même niveau que pour l’exercice précédent le montant élevé des rémunérations (soldes, indemnités, retraites) : 53 % du budget de défense.
Au terme de l’exercice budgétaire, les effectifs de l’armée de terre et du Marine Corps seraient maintenus à 785 000 et 196 000 (4). Seules l’armée de l’air et la marine subiraient une légère diminution ramenant leurs effectifs respectivement à 590 000 et 529 000 hommes. Au total, les forces armées disposeraient alors d’un effectif maximum de 2 100 000 h (l’estimation pour le 1er juillet 1975 est de 2 129 000 h).
Sur le plan des forces, le projet de budget propose successivement les dotations estimées nécessaires pour les forces stratégiques, les forces d’emploi général, les moyens de transport stratégique et les forces des réserves.
L’arsenal stratégique offensif sera maintenu sans modification quantitative : 1 054 missiles intercontinentaux, 656 missiles mer-sol, 466 bombardiers stratégiques en formations (400 Boeing B-52 Stratofortress et 66 General Dynamics FB-111 Aardvark).
34,2 % du budget de défense sont demandés pour les forces d’emploi général : l’important supplément de dotation demandé par rapport à l’exercice précédent (5) est justifié par la nécessité d’améliorer les armements – notamment avions, hélicoptères et véhicules chenilles de combat – par mise en service de matériels neufs ou par modernisation d’équipements anciens.
Le projet de budget prévoit la poursuite du processus destiné à améliorer l’efficacité opérationnelle des forces terrestres : divisions d’active portées de 16 à 19 (dont 3 de l’USMC) et acquisition de 120 hélicoptères, de 816 chars M-60A1, de 1 320 Véhicules tout-terrain (VTT) M-113, de 50 000 missiles Dragon et TOW.
Les forces navales continueront en 1975-1976 à développer leur effort de modernisation, en particulier dans le domaine de la « motorisation nucléaire » des bâtiments de combat, destinée à alléger la dépendance logistique des flottes à la mer. En fin d’année budgétaire FY-76, l’US Navy devrait notamment mettre en ligne 13 porte-avions, 68 Sous-marins nucléaires d’attaque (SNA), 185 bâtiments de combat et 63 bâtiments amphibies.
Les forces aériennes devraient disposer, au 1er juillet 1976, de 38 escadres tactiques : 22 pour l’US Air Force, 13 pour la marine, 3 pour l’USMC. Le projet de budget FY-76 prévoit en particulier l’entrée en formations des chasseurs de supériorité McDonnell Douglas F-15 Eagle (108 appareils demandés pour l’USAF) et Grumman F-14 Tomcat (36 demandés pour la Navy).
Maintenue sans modification à 74 appareils Lockheed C-5A Galaxy et 240 quadriréacteurs Lockheed C-141 Starlifter, la flotte du transport aérien stratégique devrait voir le rayon d’action de ses appareils fortement accru par la capacité de ravitaillement en vol (effective dès maintenant sur les C-5A après complément de formation des navigants ; dispositifs en cours d’installation sur les C-141). Il n’est pas prévu de modification sensible pour les moyens du transport maritime stratégique (environ 65 bâtiments).
Une augmentation budgétaire de 12 % est demandée pour les forces des réserves : une diminution de 47 000 personnels devrait ramener le total de ces forces à 914 000 h.
La part demandée pour la recherche et le développement est accrue par rapport à l’exercice précédent : 9,36 Md$ contre 7,7. Parmi les principaux programmes, cinq devraient recevoir les crédits permettant de poursuivre l’effort technologique jugé nécessaire pour maintenir l’avance prise par les États-Unis dans le domaine des armements stratégiques offensifs : le projet Trident (sous-marin nucléaire et missile), le bombardier Rockwell B-1 Lancer, le missile nucléaire de croisière (USAF et US Navy), l’amélioration des Missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) Minuteman et la mise au point d’un nouveau missile intercontinental (M-X).
Le projet de budget de défense FY-16 continue la tradition des budgets présentés depuis la fin de l’engagement au Vietnam en assurant une part spécialement importante aux rémunérations des personnels. Il met l’accent sur l’accroissement de capacité des forces d’emploi général plutôt que sur l’amélioration des systèmes nucléaires stratégiques. Il maintient les orientations prises les années précédentes en matière de recherche et de développement des armements stratégiques, marquant bien ainsi la volonté des États-Unis de suivre le rythme qui leur serait éventuellement imposé dans ce domaine par l’URSS.
Les différents chapitres du budget de défense seront, cette année encore, âprement discutés par les Commissions spécialisées du Congrès, et des amputations viendront inévitablement limiter dans plusieurs secteurs les possibilités de la Défense. Pour atténuer l’ampleur de ces amputations, la Maison-Blanche et le Pentagone ne se contenteront sans doute plus de faire valoir l’inquiétante amélioration du potentiel des forces soviétiques : l’évocation des incidences défavorables sur l’économie et l’emploi, d’une diminution des commandes militaires, pourrait apparaître plus convaincante pour le nouveau Congrès, dans le contexte actuel. ♦
(1) Dénommé aux États-Unis FY-76, et couvrant la période du 1er juillet 1975 au 30 juin 1976.
(2) L’année budgétaire débutera le 1er octobre à partir de 1976 (FY-77).
(3) 386 Md$ en autorisations d’engagement de dépenses et 350 Md$ en dépenses pour l’année.
(4) Niveaux estimés pour le terme de FY-75.
(5) 34,2 % pour FY-76, 31,6 % pour FY-75.