Faits et dires
* Cette année, nous progresserons en direction de notre objectif ultime, qui est la suppression de toutes les armes nucléaires de la surface de la Terre.
Le président J. Carter dans son discours
d’investiture, le 12 janvier 1977
* Dans sa première interview accordée à la presse américaine, le nouvel hôte de la Maison-Blanche explicita sa pensée en quatre points : arrêt de tous les essais nucléaires ; sévères contraintes exercées par les deux super-Grands pour aboutir à un nouveau traité sur la limitation des armements stratégiques ; réduction effective de l’arsenal nucléaire des États-Unis et de l’URSS (« pour administrer au monde la preuve de leur sincérité ») : réduction identique dans les autres pays.
Washington, le 24 janvier 1977
* Première étape envisagée par la presse de Washington : les États-Unis proposeraient de ramener de 2 400 à 2 050 le nombre de leurs missiles intercontinentaux. Réaction du porte-parole de la Maison-Blanche : « aucune formule n’est actuellement envisagée de manière active ».
Washington, le 27 janvier 1977
* M. Cyrus Vance. le nouveau secrétaire d’État américain, envisage de se rendre à Moscou vers la fin du mois de mars. Son but : relancer les négociations SALT. Le premier accord du genre, signé en 1972. expire le 3 octobre prochain.
* Auparavant, dans son dernier message sur l’état de l’Union, le président Gerald Ford lançait cette mise en garde : L’équilibre global des forces qui prévaut actuellement ne sera maintenu qu’au prix d’un effort continu… La sophistication des armes modernes exige que nous prenions des décisions dès aujourd’hui si nous voulons assurer notre sécurité dans dix ans.
* Si la nouvelle administration américaine envisage de réduire le budget de la défense, elle ne prévoit pas de restreindre les crédits destinés à l’Otan. Le vice-président Walter Mondale l’a affirmé à Bruxelles en précisant : M. Carter est déterminé à maintenir une présence militaire pleinement efficace en Europe.
Bruxelles, le 24 janvier 1977
* Il ne faut pas que l’Otan devienne seulement une association militaire germano-américaine. C’est l’une des conclusions du rapport Nunn, établi par deux sénateurs à la demande de la commission américaine des forces armées. Un rapport qui vient épauler les vues du Pentagone : les forces soviétiques déployées en Europe sont maintenant en mesure de lancer une attaque conventionnelle dévastatrice : le délai d’alerte dont disposerait l’Occident serait très réduit. Bref, l’Europe serait rapidement vaincue par un « Blitzkrieg » des forces du Pacte de Varsovie. L’Allemagne ainsi envahie, les responsables soviétiques chercheraient à imposer leurs volontés sans aller jusqu’à l’engagement nucléaire.
Rapport Nunn-Bartlett, 24 janvier 1977
* Bien qu’il soit difficile de concentrer l’intérêt des Canadiens sur les visées soviétiques en Europe, la discussion de ce problème devient de plus en plus inévitable, d’autant que la menace est tout à fait réelle et qu’elle s’amplifie.
M. Barney Danson, ministre canadien de la Défense,
Ottawa, le 13 janvier 1977
* Les plans de l’Otan, tenant compte d’un éventuel Blitzkrieg soviétique, pourraient être modifiés en conséquence : l’armée américaine a divulgué un rapport en ce sens. Un rapport secret, censuré dans sa diffusion restreinte : quelques dépêches d’agence en ont fait état. Aucune confirmation officielle cependant.
15 janvier 1977
* Il est absolument faux que l’URSS soit en passe de s’assurer la suprématie militaire sur les États-Unis comme le prétendent divers experts stratégiques tant aux États-Unis qu’à l’étranger : aucune administration américaine ne le permettra.
Henry Kissinger devant le National Press Club,
Washington 10 janvier 1977
* Les États-Unis sont intervenus militairement ou ont menacé de le faire 215 fois depuis la fin de la seconde guerre mondiale pour soutenir leur politique étrangère. Les forces nucléaires stratégiques américaines ont été mises en état d’alerte à 33 reprises, avec menace directe contre l’URSS en 1962 lors de la crise de Cuba et en 1973 au moment de la guerre du Kippour. De leur côté, et pendant la même période, les Soviétiques n’ont utilisé la menace ou ne sont intervenus que 115 fois.
Étude effectuée à la demande du Pentagone par la Brookings Institution
* L’équipe du président Jimmy Carter en matière de défense : M. Harold Brown fait partie du cabinet en détenant le secrétariat à la Défense. L’armée de terre est placée sous la responsabilité de M. Clifford Alexander, avocat, qui est ainsi le premier Noir à occuper ces fonctions. La marine sera sous contrôle de M. Graham William Claytor, avocat lui aussi. Le porte-parole du Pentagone est un journaliste : M. Thomas Ross du Chicago Sun Times. Le conseiller personnel du président pour la sécurité nationale est M. Zbigniew Brzezinski.
* Nous perfectionnons notre défense. Il ne saurait en être autrement. Nous n’avons jamais sacrifié, nous ne sacrifierons jamais la sécurité de notre pays ni la sécurité de nos alliés. Mais les allégations selon lesquelles l’Union soviétique va au-delà de ce qui est suffisant en matière de défense et s’efforce d’obtenir la supériorité dans le domaine des armements, dans le but de lancer la première attaque, sont absurdes et totalement dénuées de fondement… Notre pays ne se lancera jamais sur le chemin de l’agression.
M. Léonid Brejnev à Toula, le 18 janvier 1977
* En France, le président Giscard d’Estaing a mis en relief les trois préoccupations fondamentales qui doivent orienter la réflexion et l’action des responsables de notre défense :
— le monde dans lequel nous vivons évolue rapidement et un certain nombre de décisions d’orientation doivent se préparer dès maintenant, notamment lorsqu’il s’agit de déterminer quels devront être nos moyens de défense dans quelques années…
— ensuite je crois très important pour la France que notre pensée militaire, notre pensée de défense soit reconnue comme l’une des plus avancées et qu’elle conserve sa qualité et son rayonnement…
— enfin, la Nation confie (à l’Armée) une grande partie de sa jeunesse et elle continuera à le faire puisque notre dispositif de défense repose sur le système de la conscription. La plupart des jeunes Français passent ainsi sous votre autorité à un moment décisif de leur formation psychologique et civique… Que ce passage de la jeunesse française dans les armées soit profitable, non seulement pour elle, mais aussi pour la France dans le sens de sa cohésion sociale et civique.
À l’Élysée, lors de la présentation des vœux des armées par le général Méry
* Une défense véritablement nationale et indépendante repose tout à la fois sur la possession d’un armement nucléaire de dissuasion et sur la participation du peuple français tout entier.
M. Yvon Bourges, ministre de la Défense,
répondant aux vœux du général Méry
* La marine française dispose du quatrième SNLE : l’Indomptable. À la différence du Redoutable, du Terrible et du Foudroyant, il est équipé de fusées à ogives nucléaires de l’ordre de la mégatonne. Le cinquième SNLE, le Tonnant, entrera en service en septembre 1979.
* Le vendredi 28 janvier, M. Yvon Bourges, ministre de la Défense, a assisté aux essais du nouveau missile air-air Matra Super 530. Cela se passait à la base aérienne de Cazaux en Gironde.
* Le secrétariat américain à la Défense a ordonné à l’armée de l’air de lancer la production des Mark 12 A, une nouvelle tête de missile deux fois plus puissante que celles équipant actuellement les fusées Minuteman 3.
* Le Pentagone en est maintenant convaincu : la Chine dispose de missiles intercontinentaux. Le CS S-3 serait capable d’atteindre l’Europe orientale, quant au CS S-4 il aurait une portée de 12 000 kilomètres et sa charge nucléaire atteindrait la mégatonne.
* Des clients mécontents : ceux qui ont conclu le « marché du siècle » en portant leur choix sur le F-16, l’avion de combat américain. La Belgique, la Norvège, les Pays-Bas et le Danemark redoutent que la promesse d’avoir à fabriquer eux-mêmes 58 % de la valeur de chaque appareil ne soit pas tenue. Aussi ces pays exigent-ils des États-Unis un engagement ferme de coproduction avant de signer le contrat définitif.
* La Turquie menace de quitter l’Otan si l’accord de coopération de défense avec les États-Unis n’est pas approuvé par le Congrès américain. Une telle décision toucherait quelque 6 000 techniciens américains qui observent depuis le territoire turc l’Union soviétique et captent ses émissions électroniques.
* Le Sud-Yémen condamne la cession d’une base militaire aux États-Unis par le sultanat d’Oman et de Mascate. Il s’agit de l’île de Mesira, au large d’Oman, et cette affaire compromet les efforts de l’Arabie Séoudite pour apaiser les esprits dans la région depuis l’intrusion des forces iraniennes dans le golfe.
* À propos du repêchage d’un sous-marin soviétique dans le Pacifique (cf. notre précédente chronique), Time du 20 décembre 1976 reconnaît avoir été abusé par un soi-disant témoin oculaire qui, en fait, avait quitté l’équipage du Glomar Explorer bien avant l’opération. On ne sait donc de celle-ci rien d’autre que ce qu’a publié dans notre revue de janvier 1976 Fabrice Théobald sous le titre « L’opération Jennifer et le repêchage d’objets sous-marins ».