Outre-mer - Les pays de la « Ligne de front » - Corne orientale de l'Afrique : Djibouti après l'indépendance
La pression africaine sur l’Afrique australe dite ségrégationniste s’exerce à partir de quatre États limitrophes : le Mozambique, la Tanzanie, la Zambie et l’Angola. Le Malawi et le Botswana ont encore trop d’intérêts communs avec Pretoria pour être en mesure de jouer un rôle actif dans cette affaire. En arrière-plan, le Zaïre peut avoir aujourd’hui une influence d’autant plus modératrice sur la Zambie et la Tanzanie que ses démêlés récents avec l’Angola ont accru sa méfiance à l’égard de la politique africaine de l’URSS : la prise de Kapanga, le 26 mai, six jours après la chute de Diloto, laquelle ponctuait la participation marocaine aux opérations militaires, mettait fin à une tentative de sécession katangaise qui avait visé non seulement à priver le Zaïre de sa plus importante source de richesse mais aussi à placer le Shaba sous l’influence exclusive des pays les plus engagés dans une décolonisation « partisane » de l’Afrique australe.
Les États africains, qui ont soutenu matériellement ou moralement le Zaïre pendant la crise, l’ont fait pour la plupart parce qu’ils étaient confrontés eux-mêmes aux difficultés que connaissent d’autres secteurs du continent : le Maroc est engagé dans la pacification du Sahara occidental où il affronte le POLISARIO que soutient l’Algérie ; le Soudan, qui craint que l’évolution de l’Éthiopie vers le « socialisme-léninisme » n’ait des conséquences sur la liberté de navigation dans le détroit de Bab el-Mandeb et ne provoque une relance de l’instabilité dans ses provinces méridionales, appuie la rébellion érythréenne et protège les adversaires traditionalistes du Deurg ; derrière ces deux pays, se profilent l’Égypte et l’Arabie saoudite, par conséquent, les rivalités internes du monde arabe. En soutenant le Zaïre, tous ces États voulaient prouver que la solidarité des pays modérés n’était pas un vain mot mais ils favorisaient ainsi, volontairement ou non, un régime que les progressistes accusent de freiner la libération de l’Afrique australe. Pour la première fois depuis 1973, le problème sud-africain s’insère donc presque ouvertement dans le jeu des divisions idéologiques du continent.
Le rétablissement de l’ordre au Zaïre ne signifie pas d’ailleurs que la paix soit définitivement revenue dans cette zone. Le Zaïre renforce son régime autoritaire, réorganise son armée et cherche à profiler du succès obtenu par le général Mobutu sur le plan diplomatique, après plusieurs années d’isolement, pour épurer son administration et renforcer l’autorité centralisatrice du MPR (Mouvement populaire de la Révolution), de la JMPR (Jeunesse du MPR) et de l’UNITA (Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola), respectivement parti, mouvement de jeunes et fédération syndicale uniques, tout en abandonnant la théorie de l’authenticité dont les principes avaient favorisé quelque peu les tendances centrifuges. Afin d’améliorer ses relations avec Luanda, le chef de l’État, bien qu’il réaffirmât que le Cabinda ne fait pas partie de l’Angola, a renoncé officiellement à soutenir le FLEC (Front pour la libération de l'enclave de Cabinda) : on ne parle donc plus de M. Ranque Franque, son président, qui réside à Kinshasa mais M. N’Zita Henrique Tiago, vice-président et chef suprême des armées, aurait formé, dans le nord-est du territoire cabindais, un gouvernement provisoire qui attendrait que le succès des armes lui assurât une audience internationale. De même, les autorités zaïroises auraient fait désarmer les militants du FNLA (Front national de libération de l’Angola) stationnés au Zaïre mais les maquis de ce mouvement existent encore à l’intérieur de l’Angola, et les frontières peuvent difficilement être rendues imperméables avant que des relations confiantes soient nouées entre Kinshasa et Luanda. Il n’est pas certain non plus qu’au Shaba, malgré le retour en force de l’armée zaïroise, des maquis luanda ne provoqueront pas de nouveaux troubles sans doute peu spectaculaires mais qui, en maintenant une tension entre les deux gouvernements, pourraient contrarier la mise en application d’une coopération efficace.
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