La politique culturelle : bilan de deux années d'action
« Je ne prétends pas penser au niveau de Malraux, ni vivre au niveau de Michelet, mais j’essaierai de diriger ce ministère avec toute mon expérience et ma conviction afin que la politique culturelle soit vraiment un élément fondamental de l’action gouvernementale ». C’est en ces termes que s’est exprimé Jacques Duhamel lorsque, en janvier 1971, il prit ses fonctions au Ministère des Affaires Culturelles, sûr de l’appui du Président de la République qui avait déjà manifesté publiquement son intérêt pour les problèmes culturels et du Premier Ministre, M. Chaban-Delmas qui, peu auparavant avait, dans un article remarqué, souligné l’importance de la politique culturelle dans l’élaboration d’une nouvelle société.
Deux ans plus tard, il est possible de faire le bilan de cette action dont il n’est pas exagéré de dire qu’elle a effectivement promu la culture au rang d’une donnée fondamentale de l’action gouvernementale. En effet, si la culture fut longtemps, sous le vocable de « Beaux-Arts » ou d’« Arts et Lettres », un compartiment annexe de l’Éducation Nationale, la création en 1959 d’un Ministère des Affaires Culturelles avec André Malraux lui conféra l’autonomie et la dignité d’une administration de plein exercice et permit le lancement de formes nouvelles d’action culturelle. Mais il devint de plus en plus visible que le développement culturel, en tant qu’il exprime une préoccupation de qualité de la vie et une exigence de dignité, concernait l’État tout entier. Presque toutes les administrations doivent lui faire une part : de l’esthétique industrielle à l’urbanisme, du développement rural au tourisme, de l’enseignement à l’aménagement du territoire. Aussi, à l’initiative du Ministère des Affaires Culturelles, des institutions ou des mécanismes ont été imaginés qui permettent de rendre présente la donnée culturelle dans l’ensemble de l’activité gouvernementale, comme l’avait demandé la commission des affaires culturelles du VIe Plan. Sans esprit impérialiste, le Ministère des Affaires Culturelles se trouve ainsi investi d’une mission d’incitation ou de coordination.
C’est ainsi qu’il a été créé, auprès du Ministre des Affaires Culturelles, mais avec vocation sur l’ensemble de l’action gouvernementale en ce domaine, un Conseil du Développement Culturel qui est un organe de réflexion, de confrontation et de stimulation vis-à-vis des différentes formes de l’action culturelle. Composé de personnalités indépendantes choisies en fonction de leur expérience dans la création et la diffusion des valeurs culturelles, ce Conseil, présidé par Pierre Emmanuel, a d’emblée situé sa réflexion et sa mission de proposition au niveau interministériel : rapports entre éducation et culture ; mission culturelle de l’O.R.T.F. et plus généralement aspects culturels de l’audio-visuel. En plaçant la libre réflexion fondamentale et l’analyse des innovations culturelles au cœur même de l’État, le Conseil du Développement Culturel, tout consultatif qu’il soit, peut jouer à l’avenir un rôle important dans la définition d’une politique qui, moins que toute autre, ne saurait être le produit d’une sécrétion bureaucratique.
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