Cinéma - Festival international du film militaire
C’est dans un cadre nouveau et avec un personnel presque, entièrement renouvelé lui aussi que s’est déroulé le 9e Festival international du film militaire. Abandonné par la ville de Versailles qui l’avait accueilli 8e fois, le festival, organisé cette fois par le ministre de la Défense, a eu lieu pour la première fois à Paris, au Palais des Congrès de la Porte Maillot. Changement de cadre, changement d’ambiance, changement enfin de style.
Si certains habitués du festival ont manifesté une nostalgie sentimentale de Versailles et de son atmosphère plus intime, il faut préciser, en contrepartie, que Paris a offert à la manifestation un public plus vaste. La tentative d’ouverture vers l’extérieur a été couronnée de succès et laisse de grands espoirs pour l’avenir. Placé, comme il se doit, sous le haut patronage de M. Yvon Bourges, ministre de la Défense, le festival a été présidé par l’éminent cinéaste Jean Delannoy, les vice-présidents du comité d’organisation étant le colonel Paul Cavarrot, directeur du Sirpa (Service d’informations et de relations publiques des armées), et M. François Schmilz, qui avait présidé aux destinées du festival versaillais. Autre « rescapé » de l’ancienne équipe, votre serviteur, devenu conseiller artistique. L’ensemble de l’organisation incombait au commissaire général, le capitaine de vaisseau Gilbert Poher, assisté du secrétaire général Jean-Marie Mahier, auxquels tous les participants ont tenu à rendre hommage pour leur efficacité et leur courtoisie.
Comme chaque année, le comité d’agrément, présidé cette fois avec vigilance et une aimable fermeté par M. Jacques Boitreaud, conseiller d’État, a éliminé quelques rares productions qui n’entraient pas dans le cadre du règlement. Le jury international, présidé par le général Claude Grigaut, était composé des personnalités suivantes : Milutin Colie (Yougoslavie), Jean Dréville (France), Édouard Graf (Suisse), Patrick Kearney (Canada), Jules Takam (Cameroun) et général Georges Vincent (France). Le jury de la photographie était présidé par M. Jean Prissette. La participation 1979 était importante puisque 37 nations présentaient des films et des photos ou avaient délégué un observateur : Allemagne fédérale (RFA), Argentine, Australie, Autriche, Belgique, Canada, Côte d’Ivoire, Cuba, Danemark, Égypte, États-Unis, Finlande, France, Grande-Bretagne, Grèce, Hongrie, Inde, Israël, Italie, Japon, Liban, Niger, Norvège, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Philippines, Pologne, Portugal, Roumanie, Sénégal, Suède, Suisse, Tchécoslovaquie, Tunisie, URSS, Yougoslavie et Zaïre.
En ce qui concerne le palmarès de la Biennale de la Photographie, on peut dire qu’il a été favorablement accueilli, bien que certains délégués aient regretté son abondance. 6 prix et 10 diplômes d’honneur, c’est peut-être beaucoup et l’on ne peut s’empêcher de penser que la diplomatie y a été pour quelque chose.
En revanche, le palmarès du festival du film a fait l’unanimité. Dans le domaine des films d’instruction, l’Iris d’or est allé à la Pologne pour Allons pleins de courage, réalisé par Casimir Sheybal, film didactique qui présente les principes et les méthodes de la formation psychologique des soldats. Avec une grande habileté, le metteur en scène a évoqué les situations les plus courantes dans lesquelles un soldat, saisi d’une peur irréfléchie, peut commettre des erreurs mortelles. L’Iris d’argent a été attribué à l’Allemagne pour un film de haute qualité intitulé La maîtrise de l’environnement… participez-y ! Les spectateurs ont été particulièrement sensibles au thème proposé : éviter à tout prix les dommages causés à l’environnement pendant des exercices ou des manœuvres. Dans la catégorie des films d’information, l’Iris d’or est allé au film australien Un dollar seulement, une réalisation éblouissante de Vincent Donovan qui montre l’utilité de la Royal Australian Air Force, dont l’entretien coûte à chaque citoyen un dollar par semaine, soit le prix d’une bouteille de bière. L’Iris d’argent a été attribué au film suisse d’Otto Michael Nann Ordre d’attaque qui illustre toutes les activités des pilotes militaires et se termine par une brillante démonstration de la Patrouille suisse. Des diplômes d’honneur ont été attribués à la Yougoslavie pour le film d’instruction La Résistance populaire généralisée dans une ville temporairement envahie, à l’Inde pour Volez en toute sécurité (instruction des pilotes) et au Niger pour le film d’information Cette armée-là, panorama des activités militaires en temps de paix.
La France a obtenu l’Iris d’or destiné à la meilleure sélection nationale, la Grande-Bretagne recevant l’Iris d’argent. Il semble bien que la France, puissance invitante, ait bénéficié de la sympathie des jurés étrangers, la sélection n’étant pas, de l’avis général, parfaite. Le film d’instruction d’Alain Masseron Hélitreuillage et transfert de charges suspendues à bord de bâtiments est d’une qualité technique remarquable, de même le film d’information de Jehan Mueller Evaltac mérite tous les éloges pour la façon simple et claire adoptée pour montrer l’efficacité opérationnelle d’une base aérienne mise en valeur au cours d’un exercice d’évaluation tactique. L’autre film de Jehan Mueller, Paris juillet 1978, est d’une qualité technique nettement inférieure en raison d’un montage assez négligé qui fait paraître le film un peu longuet. Enfin. Informer, s’informer pour commander de Guy Mier, dont l’humour a été unanimement apprécié, n’est pas une œuvre inédite. Présente dans le cadre des Journées du Film militaire de Lausanne en octobre 1978, ce film avait obtenu les deux récompenses suprêmes, prix du jury militaire et prix du jury du cinéma et de la communication.
La sélection britannique comprenait 4 films d’instruction d’une qualité technique impeccable et d’une grande efficacité didactique : La. Mer peut tuer de Gerry O’Hara (démonstration de survie en mer à la suite d’un naufrage) Réfléchissez avant de boire de Clive Mitchell (démonstration de la nécessité vitale d’une discipline personnelle dans la Marine). Bon pour le combat de John Edwards (nécessité d’un excellent état physique pour servir et comment y parvenir). Dilemme de J.-R. Wiles (nécessité d’avouer une erreur personnelle qui passée sous silence, pourrait avoir de graves conséquences dans la Royal Air Force). Dans le souci légitime de ne pas galvauder les distinctions, le jury a limité le nombre des diplômes, ceci ne doit pas empêcher le critique de souligner les mérites de quelques œuvres qui ne figurent pas au palmarès. Ainsi, nombreux ont été les spectateurs qui ont trouvé de réelles qualités aux œuvres suivantes : Le Collège militaire de la Nation (Argentine), qui montre la journée d’un élève-officier dans la grande école militaire nationale. Je n’ai pas eu peur de Giles Walker (Canada), bluette romancée autour de deux enfants découvrant une bombe dans un terrain interdit. Défense et Sécurité (Danemark) dans lequel Svend Melhling présente objectivement la politique de sécurité d’un petit pays, La bonne conduite dans des situations dangereuses et périlleuses de Robert Glosz (Hongrie), dont le pléonasme dans le titre ne doit pas faire oublier la qualité de la démonstration (méthodes pratiques de conduite pour les chauffeurs militaires), 2 850 mètres film polonais d’André Zmijewski qui montre les efforts rationnels d’un soldat contraint de vaincre tous les obstacles sur plus de 2 kilomètres en plein hiver. Chez nous, dans les Carpates de Tiberiu Enesco, exercice d’entraînement des troupes en haute montagne, sur un parcours difficile en hiver.
En résumé, le Festival international du Film militaire 1979 a été accueilli favorablement. Son niveau artistique se situait, par rapport aux confrontations précédentes, au-dessus de la moyenne. Et c’est M. Yvon Bourges, ministre de la Défense, qui a lui-même, à l’issue de la manifestation, invité toutes les nations à participer au 10e festival, en 1981… ♦