Institutions internationales - Europe : compromis ou solution ? - Solidarités économiques et politiques
La visite du Pape en France, l’entretien de M. Giscard d’Estaing avec M. Brejnev à Varsovie, les affrontements qui ont mis brutalement en question la stabilité de la Corée du Sud et ses relations avec celle du Nord, la spectaculaire consécration des rapports sino-japonais avec la rencontre de l’empereur Hirohito et du président Hua Guofeng à Tokyo, les controverses suscitées par la bombe à neutrons, l’opposition du président Carter à toute initiative qui, par l’intermédiaire du Conseil de Sécurité, porterait atteinte à la fameuse résolution 242 et remettrait en cause les accords de Camp David, n’ont pas affecté les inquiétudes suscitées par la crise de la CEE (Communauté économique européenne).
Celle-ci avait atteint une telle gravité que l’on se demandait si, au-delà de la Politique agricole commune (PAC), ce n’était pas la Communauté elle-même qui était à la veille du naufrage.
Europe : compromis ou solution
Depuis le début de la crise qui paralysait depuis des mois la vie de la CEE, les problèmes des prix agricoles et de la contribution budgétaire britannique étaient liés. En effet, Londres avait décidé de bloquer toute décision sur les prix agricoles tant que ses 8 partenaires ne lui auraient pas consenti une réduction substantielle de sa « facture européenne » à la CEE, qui atteignait 1,8 milliard d’Écus (soit 10,5 Mds de Francs) en 1980. Les ministres des Finances avaient dû, le 28 mai, se contenter de passer en revue les soldes financiers nets des 9 pays membres. Ces chiffres indiquaient que les Britanniques et les Allemands versaient davantage dans les caisses de la CEE qu’ils n’en recevaient en retour, les 7 autres pays étant en revanche bénéficiaires. Les 29 et 30 mai, les ministres des Affaires étrangères devaient s’efforcer de trouver une solution politique à ces problèmes techniques, et le 28, dans une interview à un quotidien parisien, M. Mehaignerie, ministre français de l’Agriculture, avait rappelé qu’il ne pouvait pas y avoir d’« Europe agricole sans Europe politique ». La crise se situait à plusieurs niveaux : faute d’une volonté politique que le Conseil européen ne peut que souhaiter sans vraiment la concrétiser, la Communauté s’enfonçait dans des difficultés de tous ordres, cependant que ses rouages institutionnels se bloquaient. La France avait prévu des mesures nationales en faveur de ses agriculteurs, mais c’était sans enthousiasme qu’elle envisageait de « renationaliser » son agriculture aux dépens de la politique agricole commune. Le Parlement européen était intervenu, en assortissant le relèvement de 5 % des prix agricoles d’un nouveau projet de budget avant le 20 juin : il avait en effet rejeté celui du Conseil des ministres des Finances, et la Communauté vivait sous le « régime du douzième », c’est-à-dire que chaque mois un douzième du budget de 1979 était débloqué pour faire fonctionner les institutions européennes. Le budget européen s’est élevé à 14,4 Mds d’unités de compte en 1979, soit 84,2 Mds F. Il a été financé à 46 % par une part des recettes de TVA de chaque pays, à 39 % par des droits de douane, à 11 % par des prélèvements agricoles et à 4 % par les cotisations sur le sucre. Près de 75 % des dépenses européennes ont été consacrées à l’agriculture. L’essentiel des sommes affectées à ce secteur concerne la garantie des prix des produits. La production agricole de la Grande-Bretagne vient en quatrième position, après celle de la France, de l’Allemagne et de l’Italie. L’importance de son solde déficitaire (849 millions d’unités de compte en 1979, une unité de compte valant 5,85 F) s’explique d’une part parce que sa vocation agricole est moins forte que chez ses grands partenaires européens, d’autre part parce que, désirant conserver ses courants d’échanges traditionnels, elle s’approvisionne sur le marché mondial, plus spécialement aux États-Unis et dans plusieurs pays de son ancien empire. Les prix des produits agricoles y étant moins élevés qu’en Europe, elle paie de ce fait une masse importante de prélèvements sur ses importations (différence entre les cours mondiaux et les cours européens), ce qui est une conséquence de la priorité qu’elle donne aux « préférences impériales » sur les « préférences communautaires ».
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