Revue des revues
• Le numéro d’automne de la revue Politique Internationale contient un article de Samuel T. Cohen et Marc Geneste intitulé : « Terreur sans massacre ». Les deux protagonistes de la bombe « à neutrons » chevauchent ici un nouveau cheval de bataille où ils se demandent s’il n’existerait pas des moyens plus subtils de dissuasion que la solution brutale actuelle. L’offensive terrestre, disent-ils, est déjà impensable « à cause de l’épouvantable vulnérabilité des hommes au rayonnement neutronique ». La terreur assurée par les explosions nucléaires est trop monstrueuse pour être crédible. « Au-dessous du niveau de l’holocauste anti-cités, les forces militaires, petit à petit, reprennent leur liberté d’action longtemps entravée par le mythe d’une escalade inévitable ».
Après ces affirmations fort contestables, Sam Cohen et Marc Geneste cherchent ce qu’ils appellent une terreur crédible qui continue à jouer un rôle inhibiteur. Ils pensent l’avoir trouvée dans une arme qui ne serait mortelle qu’à terme. Une bombe pourrait projeter une pluie de microbilles préalablement activées. Un tapis de rayons gamma s’abattrait ainsi sur une région et contraindrait les populations à l’évacuer ou à se terrer au plus vite. Si une partie de ces billes était luminescente, la zone ainsi contaminée serait marquée par une lueur verdâtre. Ce procédé pourrait être également utilisé dans le domaine tactique pour déloger un adversaire ou lui interdire certaines zones. On peut même penser à un engin composite gamma-bombe à neutrons, mais la technique de cette dernière l’interdit actuellement. De plus, cette nouvelle arme miracle serait bon marché. Elle ne peut être délivrée que par fusées. Sa manipulation difficile la rend totalement inaccessible aux terroristes. Sa rusticité la rend invulnérable aux défenses antimissiles. Elle n’est pas interdite par le traité de non-prolifération et a l’avantage, soutiennent ses défenseurs, de tuer la guerre sans tuer personne.
Le même numéro contient bon nombre d’articles intéressant les problèmes militaires. Une discussion très technique oppose le général Gallois et Sam Cohen sur l’emploi de la bombe à neutrons. Le général Close repose les éternels problèmes de la défense en Europe et fait une violente critique du système divisionnaire actuel qui, pour lui, remonte à Guibert. Il voit dans des unités territoriales autonomes décentralisées un complément des forces de bataille. Il estime que l’Europe doit avoir les moyens d’une stratégie globale avec une force mobile d’intervention qui lui soit propre. Deux entretiens avec Richard V. Allen et le général Haig donnent un aperçu de la politique extérieure et militaire de la future administration Reagan. Le général Haig s’y révèle partisan du retour à la conscription quand ce sera possible psychologiquement. Brian Crozier, fondateur de l’Institut d’études des conflits de Londres, rappelle enfin que l’Union soviétique n’est pas un pays comme les autres parce que les mots n’ont pas le même sens qu’ailleurs. L’URSS cherche en fait à étendre le communisme dans le monde, comme le montre l’article 28 de sa constitution. Pour l’Est, la détente est une opération aux buts précis, et l’Ouest a apporté par ce biais une véritable assistance à un ennemi éventuel. Une politique réaliste passe par une compréhension de la réalité soviétique où tout accord, tout repli, n’est qu’ajustement temporaire tactique.
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