The uncertain ally, British defence policy, 1960-1990
Ce livre vient à son temps, après l’affaire des îles Falkland. Les deux auteurs sont, le premier un ancien officier de Marine, le deuxième un officier de la Royal Air Force devenu homme politique. Ces origines expliquent peut-être certaines de leurs prises de position.
Dans une première partie, très vivante pour des Français qui n’ont pas suivi ces affaires avec attention, les auteurs retracent l’histoire de la politique militaire de la Grande-Bretagne depuis 1960. Ils nous montrent ainsi comment la force amphibie interarmées, prévue par le Livre blanc de 1962, a disparu à partir de 1966 des prévisions du gouvernement travailliste, en même temps que la Grande-Bretagne abandonnait tout ce qui était à l’Est de Suez et se repliait sur l’Europe du Nord, sous le poids de la priorité accordée en premier lieu à la force nucléaire stratégique et en second lieu aux missions spécifiquement Otan. Cette deuxième priorité a donné une importance majeure à l’Armée de terre, en particulier à la British Army of the Rhine (BAOR), la Marine royale voyant disparaître son antique prépondérance. Il en est résulté la disparition des porte-avions, dont le dernier, l’Ark Royal, a été mis à la ferraille en 1978. Pour garder un minimum d’aviation embarquée, les amiraux ont fait voter, sous le nom de Through deck cruisers, des bâtiments permettant l’emploi d’un très petit nombre d’avions à décollage court ou vertical, ces bâtiments étant ensuite rebaptisés porte-avions anti-sous-marins, ce qui n’est guère l’emploi qui a été fait aux Malouines du premier d’entre eux, L’Invincible.
La deuxième partie du livre paraît plus discutable dans la mesure où elle n’analyse plus le passé mais propose une nouvelle politique. Il est flagrant que la préoccupation majeure des auteurs est la faiblesse des moyens d’intervention outre-mer de leur pays, en particulier de la Royal Navy, au moment où ils voient les problèmes de l’Alliance atlantique s’étendre au monde entier, alors que les Américains mettent sur pied leur force à déploiement rapide. Le gouvernement actuel en est bien conscient mais n’a pu faire grand-chose, car le Royaume-Uni est engagé dans une stratégie continentale.
Pour sortir de cette situation, Michael Chichester et John Wilkinson proposent de réunir une conférence au sommet qui permettrait de faire une répartition des charges calculées sur un plan mondial, en révisant le Traité de Bruxelles pour diminuer la participation britannique à la défense du théâtre Centre-Europe (en faisant d’ailleurs rentrer la France dans l’organisation intégrée de l’Alliance, ce qui est un peu incohérent). Ainsi, la Royal Navy pourrait être remise sur pied et la Royal Air Force renforcée, surtout dans sa composante défense aérienne du Royaume-Uni. Le système militaire britannique devrait être complètement remanié par le retour au service national, et on s’aperçoit alors que le système français actuel sert de modèle de référence. Après être passés assez rapidement sur les problèmes financiers et industriels, les auteurs concluent que le gouvernement actuel est acculé à des décisions graves. S’il doit garder sa force de sous-marins stratégiques, c’est l’équilibre de ses forces conventionnelles qui est à revoir, pour doter la Grande-Bretagne de forces mobiles aérotransportées et amphibies, et ceci a été écrit avant l’affaire des Malouines. ♦