Marine - Surveillance du trafic maritime dans la zone d'Ouessant en 1982 - Physionomie de l'activité des bâtiments de la flotte
Surveillance du trafic maritime dans la zone d’Ouessant en 1982
Surveillée à partir du sémaphore du Stiff jusqu’au 13 octobre 1982, la zone de séparation du trafic d’Ouessant l’est désormais depuis le Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (Cross) du Corsen-Ouessant (Crossco). Pour sa fonction de surveillance de trafic, le Crossco dispose d’une tour radar de 73 m installée à la pointe du Stiff sur l’île d’Ouessant, et d’un centre d’exploitation implanté sur la pointe de Corsen, face à Ouessant, et qui reçoit les images radar de la tour par faisceaux hertziens. Des moyens de secours installés au sémaphore du Stiff sont très rapidement mis en fonction en cas d’indisponibilité des moyens principaux.
Organisme dépendant du secrétariat d’État auprès du ministre des Transports, chargé de la mer, le Crossco, dirigé par un administrateur en chef des affaires maritimes, est chargé d’une zone s’étendant de la pointe du Raz jusqu’à la ligne de séparation entre les préfectures maritimes de Brest et Cherbourg (soit approximativement une ligne s’appuyant sur le Mont Saint-Michel). Comme les autres Cross, ce centre remplit les missions de coordination des opérations de sauvetage dans sa zone, de surveillance des pollutions marines et de contrôle des moyens concourants à la police des pêches. En raison du trafic particulièrement dense en ce point focal à l’entrée de la Manche et des dangers illustrés par des catastrophes comme celle de l’Amoco Cadiz (un pétrolier ayant fait naufrage en mars 1978), le Crossco est en outre responsable devant le préfet maritime de la surveillance du trafic. Pour faciliter le trafic, il diffuse des bulletins d’informations réguliers ou occasionnels ayant trait aux prévisions météorologiques et aux conditions de navigation dans les parages d’Ouessant.
En 1982, le trafic dans la zone a été en très légère progression par rapport à 1981. La moyenne journalière a atteint 145 bâtiments au lieu de 140 en 1981. Les résultats obtenus en 1982 confirment la baisse progressive du pourcentage de contrevenants depuis la mise en place du système actuel en 1979. Le pourcentage est inférieur à 2 % et ce qui est très encourageant, il ne comporte que très peu de bâtiments transportant des hydrocarbures ou des matières dangereuses.
L’identification du trafic, et en particulier des contrevenants, est assurée à 89 % par une permanence des bâtiments de la Marine nationale et 11 % par le remorqueur de haute mer de la société « Les Abeilles Internationales » basé à Brest et affrété par la Marine nationale. Cette activité de service public, pour la seule zone d’Ouessant, représente avec plus de 10 000 heures de mer. 18 % de l’activité de service public et 3 % de l’ensemble de l’activité de la Marine. La plupart des bâtiments basés à Brest ont participé à cette mission que la Marine souhaiterait voir remplir par des bâtiments spécialisés, pour lesquels un programme de construction avait été présenté mais qui n’a pu encore être réalisé.
Sur un total de 991 contrevenants, 266 constats d’infractions ont été établis et 44 navires ont pu faire l’objet d’une enquête à bord lors d’une escale dans un port français. Même si la pénalisation des contrevenants est difficile à réaliser en raison de la destination des navires, il est très encourageant de constater que, plus que la peur du gendarme, c’est la prise de conscience de la nécessité d’une réglementation et d’un contrôle rigoureux, pour prévenir des accidents de mer dont les conséquences peuvent être dramatiques, qui porte les commandants de navires à respecter la zone de séparation de trafic. La diminution très sensible du nombre des contrevenants en est la preuve et elle doit apporter à tous ceux qui, à terre ou en mer, se consacrent à cette tâche parfois ingrate, un encouragement et la reconnaissance du public qui leur demande ce « service ».
Physionomie de l’activité des bâtiments de la flotte
Au cours d’une année, la vie d’un bâtiment de la Marine nationale est décomposée en périodes d’activité, à la mer, d’entretien dans le port base et de séjours, dans le même port où il est cependant disponible et susceptible d’appareiller pour participer à une mission inopinée.
Chaque type de bâtiment a un rythme d’activité particulier mais celui-ci peut être modifié si par exemple le bâtiment est détaché dans une zone de présence comme l’océan Indien ou la zone des Antilles-Guyanes, ou si des missions particulières et de longue durée lui sont prescrites. D’une manière générale, on considère qu’une activité à la mer de 100 jours par an est la durée la plus favorable pour assurer au bâtiment un entretien qui lui permette de vivre en bonne santé tout au long de sa carrière qui est de 30 ans pour les grands bâtiments et de 25 ans pour les bâtiments plus petits.
Trois types d’entretien sont effectués :
• Le premier entraîne l’indisponibilité du bâtiment pour une longue période (de trois à huit mois). C’est l’occasion d’effectuer les grosses réparations avec le concours des arsenaux.
• Entre les périodes précédentes qui ont lieu en moyenne tous les 15 mois, une allocation de l’ordre de 70 jours ouvrables est attribuée aux bâtiments pour effectuer des réparations légères avec le concours de personnels militaires spécialisés. Cette allocation est répartie par l’autorité organique en tranches suffisamment longues pour que les réparations ne soient pas précipitées, et qu’elles soient étalées dans le temps en fonction des impératifs opérationnels.
• L’entretien courant est enfin effectué tous les jours par l’équipage, ce qui est pour lui le meilleur moyen de bien connaître son matériel et de déceler les défauts qui demanderont une intervention plus sérieuse.
La vie du bâtiment est donc en partie réglée par le cycle des indisponibilités pour entretien et réparation. À l’issue de ces grandes indisponibilités, le bâtiment prend la mer pour effectuer des essais pour remettre en condition opérationnelle personnel et matériel. C’est l’occasion pour le commandant de souder son équipage et de lui faire prendre les habitudes et réactions qui devront être les siennes pendant l’activité opérationnelle qui va suivre.
Cette activité opérationnelle sera encore précédée par des sorties de groupe permettant d’entraîner les unités à travailler ensemble, et le plus généralement par un stage de l’ordre d’un mois au centre d’entraînement de la flotte ou une participation très active et de tous les instants, tant à la mer qu’au mouillage est demandée à chacun.
À l’issue de ce stage le bâtiment est apte à tous les types d’opérations pour lesquelles il est prévu. Il participera aux exercices nationaux et internationaux qui sont organisés tous les ans, aux tâches habituelles correspondant aux missions qui sont confiées à la Marine, et à toute mission opérationnelle qui lui sera demandée.
Les exercices nationaux sont de durée, de spécialisation et de niveau de participation variable selon les objectifs fixés par les commandants opérationnels. À l’exception d’exercices très particuliers comme ceux concernant la chasse aux mines, ils mettent le plus souvent en œuvre des unités aussi diverses que les porte-avions, les bâtiments de surface, les sous-marins, les avions de patrouille maritime et les navires de soutien logistique. Les plus importants sont les exercices en escadre qui sont en quelque sorte l’aboutissement d’une longue période d’entraînement.
Les exercices internationaux sont de trois types :
– Les exercices Otan où la France est invitée à participer. Ils sont souvent de grande envergure et permettent des rencontres fructueuses tant au point de vue des tactiques que des relations avec nos alliés. C’est ainsi qu’en mai et juin 1983 ont lieu deux grands exercices, l’un en Atlantique, et l’autre en Méditerranée.
– Les Invitex qui sont organisés par la France et auxquels participent plusieurs nations alliées. Les plus fréquents sont ceux qui regroupent les bâtiments anti-mines de plusieurs pays.
– Les exercices bilatéraux enfin, organisés conjointement entre la France et un pays allié. De tels exercices ont lieu fréquemment avec des pays de l’Afrique francophone.
C’est le plus souvent à l’occasion de ces exercices internationaux que les équipages ont la possibilité de faire des escales dans les pays étrangers, soit à leur issue, soit au cours du transit vers la zone d’opérations.
Cette activité nationale et internationale est entrecoupée de périodes de repos à quai, au cours desquelles les équipages peuvent prendre des permissions bien méritées, sans que toutefois le bâtiment soit indisponible. Les servitudes de la vie du marin sont bien illustrées par ce fait que même en période de permission, un bâtiment doit pouvoir appareiller dans les 72 heures pour une mission quelconque, même de longue durée. L’expérience montre que ce n’est pas une vaine affirmation et que la disponibilité des hommes et du matériel n’est jamais prise en défaut. ♦
NDLR : Le monde restreint des spécialistes de la torpille vient de perdre une de ses grandes figures, l’ingénieur général de l’armement Tabarié qui, de 1947 à 1971 a tenu tous les postes de responsabilité de l’établissement de Saint-Tropez. Depuis 1976, il était chargé à la DTCN (Direction technique des constructions navales) des programmes internationaux et de la diversification.