Revue des revues
• C’est encore Foreign Affairs qui nous fournit la matière d’une analyse dans son numéro annuel, L’Amérique et le monde, 1986. L’auteur de l’article est James Schlesinger, ancien secrétaire pour la Défense, qui se demande si, après Reykjavik, on n’assiste pas à un renversement des tendances dans la situation de son pays. Il constate en effet que les États-Unis ont paru en meilleure posture que l’Union soviétique dans la première partie de la décennie 1980, contrairement à ce qui s’était passé dans la précédente.
Au milieu du deuxième mandat du président Reagan, cette tendance a paru s’inverser, avec de grandes difficultés dans les relations Est-Ouest et dans le Tiers-Monde. Les révélations de novembre 1986 font apparaître un exécutif affaibli et sur la défensive. L’analyse de James Schlesinger porte d’abord sur le Sommet de Reykjavik (1986). Celui-ci aurait dû sanctionner des accords antérieurs, non être le lieu de négociations. La conjoncture était favorable à un accord de maîtrise des armements du fait de l’IDS (Initiative de défense stratégique), de la situation économique de l’Union soviétique et de son désir d’éviter une compétition technologique. Le seul résultat tangible a été de montrer aux Européens que des accords de ce genre pouvaient être dangereux pour leur sécurité. Les négociateurs américains ont paru ignorer que les armements nucléaires demeuraient une partie essentielle de la stratégie occidentale de dissuasion, pour empêcher non seulement une attaque nucléaire mais aussi une agression classique. À un moment, le président a paru accepter l’élimination pour 1996 des armements nucléaires et l’Administration cherche à s’en dégager en la présentant comme un but à long terme. Avant de rejeter ce qui garantit actuellement la sécurité de l’Occident, il faut pourtant s’assurer qu’il existe une solution de remplacement. Le seul développement des forces classiques proposé par George Schultz (secrétaire d'État des États-Unis) fait fi de la psychologie, de l’histoire et de la géographie de l’Otan.
James Schlesinger reproche ensuite aux négociateurs de Reykjavik d’avoir proposé l’élimination des missiles balistiques sans avoir consulté le Congrès, les Alliés et les chefs d’état-major. L’affaire n’a pas été étudiée sérieusement. En 1983, en acceptant le rapport de la Commission Scowcroft, le président a entériné le concept de la triade et il vient de proposer l’abandon de deux de ses composantes. Une force de dissuasion composée d’avions et de missiles de croisière se heurterait à la défense aérienne soviétique et serait vulnérable au sol et à la mer. Il faudrait renforcer la défense aérienne des États-Unis en même temps qu’il faudrait créer une défense antimissiles. Nos forces classiques en souffriraient. À Reykjavik, l’IDS a été traitée comme si elle existait, alors qu’elle n’est « qu’une collection d’expérimentations techniques et d’espoirs lointains ». Sa mise en place en 1996 serait prématurée, même si on supprimait les missiles balistiques.
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