Afrique - Afrique australe : les pays aux mains liées - L'endettement de l'Afrique
L’histoire contemporaine a fait, de cette partie du continent qu’à défaut d’expression reconnue par les géographes on pourrait appeler l’Afrique orientale du Capricorne, un territoire dont les composantes sont interdépendantes et liées chacune à l’économie sud-africaine. L’aide que ces pays sont capables d’offrir pour l’émancipation de la communauté noire d’Afrique du Sud ne pourra donc se développer que si ces territoires parviennent à démêler l’écheveau qui les lie et auquel les intérêts étrangers, même s’ils sont opposés à la politique de Pretoria, ont toujours hésité à s’attaquer en invoquant des complémentarités géographiques qui resteront longtemps incontournables ou les difficultés d’un financement qui ne saurait être soumis qu’aux seuls impératifs de la rentabilité. Les gouvernements de ces pays sont incapables de surmonter eux-mêmes les dépenses qui leur permettraient de diversifier leurs dépendances, par conséquent de se libérer de l’emprise sud-africaine. Ce que nous appelons l’Afrique orientale du Capricorne comprend quatre États, la Zambie, le Zimbabwe, le Malawi et le Mozambique. L’histoire de leur colonisation et celle de leur développement économique, ainsi que l’enchevêtrement des ethnies qui les peuplent, expliquent à la fois l’unité de l’ensemble et la personnalité originale que chaque État a pu acquérir avec le temps. L’histoire de leur décolonisation, aisée pour les uns, longue et douloureuse pour les autres, a peut-être accentué leurs différences mais elle n’a en rien transformé les structures qui les obligent à demeurer solidaires et amenuisent les pressions qu’ils peuvent exercer à rencontre de Pretoria.
À la fin du XIXe siècle, les Britanniques cherchaient à éviter la jonction des Boers du Transvaal avec les Allemands du Tanganyika. Ils avaient exploré les territoires qui se trouvaient entre le fleuve Zambèze et le lac Tanganyika, là où des commerçants portugais avaient installé quelques comptoirs. Le Traité international de Berlin (1885) accorda à la Grande-Bretagne et au Portugal la région située au sud du fleuve Rovuma (frontière actuelle entre la Tanzanie et le Mozambique). Par une convention de 1891, ces deux puissances européennes alliées délimitèrent leurs zones d’expansion respectives, établissant ainsi, grosso modo, la frontière qui sépare actuellement le Mozambique de l’Afrique du Sud, de la Rhodésie et du Malawi. La même convention accordait à Londres, contre une assez longue remontée territoriale le long du fleuve Zambèze (représentant la province du Tête du Mozambique, qui joue un rôle important dans la politique de ce pays), des privilèges en matière de communications et d’installations portuaires dans le territoire appelé à devenir le Mozambique, afin que l’hinterland britannique pût être assuré, sur l’océan, d’un débouché qui fût contrôlé par des sociétés anglaises, installations que Lisbonne n’avait pas d’ailleurs les moyens de construire.
Au cours de la dernière décennie du XIXe siècle, Londres put organiser son emprise : d’un côté, le Colonial Office installa son Administration autour du lac Tanganyika pour former le Nyassaland (aujourd’hui Malawi), de l’autre, elle accorda à la British South Africa Company de Cecil Rhodes, le privilège de régenter les territoires situés de part et d’autre du cours moyen du Zambèze, ce qui devint la Rhodésie. Appelé à reprendre ses droits sur cette région à partir de 1923, Londres lui octroya deux régimes différents : au sud du fleuve (Rhodésie du Sud), terres à vocation agricole, l’autonomie interne fut accordée rapidement aux colons, tandis qu’au nord (Rhodésie du Nord), l’autorité était remise à un gouverneur, bientôt assisté d’un conseil législatif, dont les membres, en majorité nommés, représentaient la population européenne. De son côté, Lisbonne mettait en place une Administration directe au Mozambique dont la pacification ne fut achevée qu’en 1923.
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