Deux pays dAmérique latine s'étaient longtemps tenus à l'abri de l'intervention des militaires dans la politique : l'Uruguay et le Chili. En prenant le pouvoir en février 1973, par un processus modéré et progressif évitant toute effusion de sang, les militaires uruguayens, même s'ils ont maintenu formellement une large part des institutions établies, n'en ont pas moins rompu une longue tradition démocratique. Au Chili, la prise du pouvoir, en septembre 1970, a été le fait d'une armée formée à l'américaine aux techniques de guerre anti-subversive et foncièrement hostile à l'expérience marxiste du président Allende : d'où le caractère sanglant du coup de force et de la répression qui l'a suivi.
Quoi qu'il en soit de la tragédie chilienne, on ne peut l'abstraire de ce phénomène, très général en Amérique latine, du rôle politique des forces armées, souvent seules structures solides et s'arrogeant comme telles le droit d'intervenir en arbitres et en recours suprême dans les situations où la nation leur apparaît menacée de chaos. C'est l'évolution historique de ce phénomène qu'étudie l'auteur. De prochains articles seront consacrés au cas uruguayen et au cas chilien.