À quoi servent les ÉtatsUnis et que peuton désormais en attendre ? Personne ne semble en mesure de le dire, surtout pas les Américains qui se réfugient dans les mythes stériles d’un passé révolu. Mais la nation indispensable peutelle renouer avec une destinée manifeste évanouie dans le mirage de ses guerres orientales ?
De (l’impossible) restauration américaine
Concerning (the Impossible) American Restoration
What does the United States serve, and can we continue to wait for it? No one seems to be in a position to say, particularly not the Americans who take refuge in sterile myths of a finished past. But can the indispensable nation revive itself with a manifest destiny disappearing into the mirage of its Eastern wars?
Allah ! Qui me rendra ma formidable armée ? Ce vers hugolien (1), repris par Charles de Gaulle dans ses Mémoires de guerre, pourrait s’appliquer aux États-Unis de 2012. « Quoi ! C’était une armée, et ce n’est plus qu’une ombre ! ». Certes, il fut un temps où une once d’or s’achetait 35 dollars, où la National Aeronautics and Space Administration (NASA) lançait une fusée par semaine et où Armstrong plantait la bannière étoilée sur la Lune. Aujourd’hui, il faut débourser 1 700 dollars pour le même fragment de métal jaune, la NASA a mis la clef sous la porte et le seul Armstrong qui fasse parler de lui ne joue pas de la trompette, mais se voit confisquer ses trophées vélocipédiques. Dès lors, qu’attendons-nous de l’Amérique ? Un très improbable retour. Mais pourquoi l’attendons-nous ? La résilience serait-elle impossible dès qu’il s’agit du rêve américain ? Et que dire de cette américanisation supposée du monde qui aurait dû assurer sa domination sinon, comme le faisait également remarquer Victor Hugo à la veille du Second Empire, que les grandeurs ne semblent jamais plus déchues que lorsqu’on tente de les restaurer ?
Qu’est-ce que restaurer veut dire ?
Rien de plus trompeur que le mot : on ne remet pas à l’identique. Prenons 1815, ce « choc intellectuel en différé de deux mondes, [où] monarchie et révolution s’affrontèrent à égalité, firent valoir leurs droits et leurs raisons » (2). Pour qu’il y ait restauration, il faut qu’il y ait confrontation et tension entre deux principes dont l’un n’aura pas totalement remplacé l’autre, et finalement compromis. C’est ce qui manque au grand retour à soi de l’Amérique, une ouverture à autre chose qu’elle-même, elle qui se replie comme jamais sur ses certitudes et la pastorale des temps héroïques : le Mayflower, les Covenants (alliance entre Dieu et un peuple) et des institutions sacralisées, mais vieilles de deux siècles et demi.
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