Armée de terre - La gestion des restructurations dans l'Armée de terre
Aujourd’hui, les militaires de l’Armée de terre ont, dans leur grande majorité, conscience de la rupture déterminante survenue ces toutes dernières années dans la situation internationale. Ils partagent l’idée que, grâce aux efforts consentis pour mettre sur pied et entretenir un outil militaire adapté à une situation géostratégique qui a prévalu pendant près de quarante ans, les forces armées alliées peuvent s’honorer d’avoir joué un rôle déterminant dans la victoire du camp de la liberté. Pendant cette longue période, l’Armée de terre française a rempli sans faillir la mission qui était la sienne aux côtés de ses alliés.
Le contexte géopolitique a donc radicalement changé, mais les militaires constatent qu’il est encore loin d’être stabilisé. Ils se considèrent généralement comme étant placés dans une situation de mutations comparable à celle qu’ont connue leurs anciens en 1945, ou à la fin des opérations d’Afrique française du Nord.
Une tendance générale
Tout en restant très vigilants, ils souscrivent à la volonté affichée d’adapter leur outil à une nouvelle conjoncture internationale, afin de rester prêts à tout instant à faire face aux risques nouveaux. La menace d’une attaque brusquée venant de l’Est s’est au moins provisoirement délitée. Elle a fait place à une fragmentation des risques, réels, mais d’autre nature.
Cette évolution se traduit logiquement par une diminution des formats des principales armées occidentales et de l’ex-Pacte de Varsovie, ainsi que par une réduction des dépenses consacrées à la défense. Les militaires admettent donc que les armées françaises ne peuvent échapper à cette tendance, mais souhaitent, bien sûr, que la limitation de nos efforts soit plus faible que celle des autres pays, constatant que les principaux d’entre eux, et notamment les États-Unis, partent d’un seuil plus élevé.
Projet d’ensemble
L’orientation des restructurations en cours, sur lesquelles les militaires sont déjà informés, est la suivante : les forces terrestres en temps de paix comprendront, en 1997, 225 000 hommes ; leurs composantes seront rééquilibrées entre Force d’action rapide (FAR) et Corps blindé mécanisé, entre professionnels et appelés, entre formations d’active et de réserve, et les unités seront rassemblées dans des casernements adaptés. L’objectif est de renforcer la capacité de ces dernières à maîtriser les forces armées qui s’affrontent aujourd’hui dans le monde, en liaison avec les autres armées françaises et alliées, dans un contexte de plus en plus international. L’État-major de l’Armée de terre (EMAT) a donc insisté pour que la hiérarchie fasse savoir à l’ensemble des cadres que les dissolutions de 1993 s’inscrivent dans un projet d’ensemble qui a été présenté au ministre de la Défense fin janvier 1992 et sur lequel ils seront informés avant l’été.
Dissolutions 1993
8e Division d’infanterie
– 8e Régiment de commandement et de soutien (RCS) + État-major (EM) Amiens (80)
– 67e Régiment d’infanterie (RI) Soissons (02)
– 94e RI Sissonne (02)
– 7e Régiment de chasseurs à cheval (RCh) Arras (62)
– 41e Régiment d’artillerie de marine (RAMa) La Fère (02)
– Cies de génie 8e DI Rouen-Oissel (76)
Régiments Pluton et soutien
– 4e Régiment d’artillerie (RA) Laon-Couvron (02)
– 3e RA Mailly (10)
– 22e Bataillon du matériel/PC Oberhoffen (67) - Soutien
– 22e BM/DSA Laon (02) -Soutien
– 22e BM/DSA et 21e BM/ PC Mailly (10) - Soutien
Autres formations
– 120e Régiment du Train (RN) Fontainebleau (77)
– 57e Régiment de transmissions (RTrs) Mulhouse (68)
– 58e RTrs Laon (02)
– Batterie de défense NBC du 2e CA Strasbourg (67)
– 153e RI Mutzig (67) remplacé par 44e RT en 1994
– 6e RA Phalsbourg (57), fusion avec 7e RA Nevers (58)
– 8e Régiment de hussards (RH) Altkirch (88)
– 601e Régiment de circulation routière (RCR) Achern (FFA)
– Établissements des subsistances Strasbourg (67) et Rouen (76)
– Établissement annexe des subsistances Verdun (55)
– Centre mobilisateur (CM) n° 54 Héricourt (70), CM 80 Moulins (03)
– Dépôts de munitions Ressaincourt (57) et Sassey (27)
Commissariat de l’Armée de terre
– Amiens (80), Dijon (21), Fréjus (83), Orléans (45), Montpellier (34)
Établissements du génie :
– Amiens (80), Poitiers (86)
Matériel :
– 7e RMat Trêves (FFA)
– 3e RMat, 1re Cie Laon (02)
– 3e RMat, CCS Beauvais (60)
– Établissement régional du matériel (ERM) Orléans (45), ERM La Fère (02) *
– Magasin central de rechanges et outillage Bourges (18) *
* fermeture progressive
Réorganisation 1993
– 32e RA Oberhoffen (67), Pluton, transformé en RA AU-F1
– 4e Régiment du Génie (RG) La Valbonne (01) remplacé par 7e Bataillon de Génie de division alpine (BDGA) Avignon
– 8e RI Noyon (60) transformé en Régiment de la Circonscription militaire de défense (RCMD)
– 602e Régiment de circulation routière (RCR) Dijon (21) remplacé par 27e RI (RCMD)
– Direction des travaux du Génie (DTG) Metz (57), Nancy (54), Strasbourg (67), Châlons-sur-Marne (51) transformation en Établissement du Génie (EG)
– École supérieure et d’application du matériel (ESAM) Bourges (18)
– ERM Lyon (69), Fontainebleau (77), Metz (57)
Allégements :
– ERM Versailles (78), Besançon (25), Belfort (90), Corte (20) fermeture 1994
– Établissement de réserve générale du matériel (ERGM) Saint-Priest (69), Le Mans (72), Gien (45), Clermont-Ferrand (63), Montauban (82), Poitiers (86), Neuvy-Pailloux (36)
– Établissement mixte subsistances habillement, Dijon (21)
Transferts
– 1er RAMa Montlhéry (91) sur Laon-Couvron
– 602e RCR Dijon (21) sur Fontainebleau
– 7e Bataillon du génie de la 27e DA Avignon (84) sur La Valbonne
– Brigade logistique (BL) 3e CA Beauvais (60) sur Lille
– École militaire préparatoire Le Tampon (La Réunion) à l’Éducation nationale
– Commandement des écoles de l’Armée de terre (CEAT) Paris (75) sur Tours
– Centre national de soutien spécialisé des Transmissions 1 Bicêtre (94) et CSST 2 Mont-Valérien (92), sur Orléans en 1994
– CM 287 Folembray (02), sur Sissonne ou Laon
Dissolutions transferts
– EM 2e CA Baden (FFA) : transfert 50 % pour Corps d’armée européen (CAE)
– 20e RT Baden (FFA) : transfert 50 % pour CAE
– 51e RA Wittlich (FFA) : batteries ventilées
Gestion humaine
Pour un militaire, il est toujours douloureux de voir disparaître des unités qui ont servi vaillamment et avec succès. L’esprit de corps, qui est un des éléments essentiels de la capacité opérationnelle des unités, souffre de toute amputation. Le sort des cadres et des engagés dont les formations disparaissent ne laisse personne indifférent dans l’Armée de terre. En effet, ces restructurations auront des conséquences sur la mobilité des personnels et sur leur vie familiale, parfois même sur leur propriété dont la revente ou la location sera, dans la plupart des cas, difficile. Le souci du Chef d’état-major de l’Armée de terre (Cémat), souvent exprimé, est d’organiser humainement cette mutation, en s’assurant notamment que les officiers et sous-officiers concernés par ces mesures, participeront, avec leurs camarades, dans les meilleures conditions possibles, à la construction de l’Armée de terre de demain. La DPMAT (Direction du personnel militaire de l’Armée de terre) mène un sérieux effort dans ce domaine. En 1992, 87 % des cadres des unités dissoutes seront affectés dans l’une des trois garnisons de leur choix. ♦