Gendarmerie - Un anniversaire mouvementé : les vingt ans du Groupe d'intervention de la Gendarmerie nationale (GIGN)
Au-delà des cérémonies officielles, des démonstrations spectaculaires et des discours, le GIGN a célébré à sa façon ses vingt années d’existence. L’épisode est encore présent dans nos esprits par la magie – presque la malice – de la télévision.
En quelques mots : 26 décembre 1994, 17 h 15, aéroport de Marseille-Marignane. Le GIGN donne l’assaut à l’Airbus A300 d’Air France assurant la liaison Alger-Paris, détourné, deux jours auparavant, par quatre terroristes appartenant au Groupe islamique armé (GIA), qui s’étaient emparés de l’appareil sur la piste de l’aéroport Houari-Boumediene. Un détournement sanglant : avant l’intervention du GIGN, les pirates de l’air avaient froidement exécuté trois passagers (un policier algérien, un diplomate vietnamien et un employé de l’ambassade de France) et menaçaient de faire sauter l’appareil. 17 h 35 : fin de l’assaut, les quatre terroristes sont tués, treize des cent cinquante-neuf passagers et trois membres d’équipage sont légèrement blessés. Le GIGN, pour sa part, compte dans ses rangs une dizaine de blessés, dont quatre assez sérieusement. La presse dans son ensemble s’est amplement fait l’écho de l’exploit réalisé par ces « supergendarmes » en treillis bleu nuit, honorés ensuite comme il se doit par les plus hautes personnalités de l’État. Courage, efficacité, détermination, professionnalisme furent alors les maîtres mots les plus fréquemment utilisés par les médias et les communiqués officiels pour décrire l’action audacieuse des hommes du chef d’escadron Favier.
Avec quelques mois de recul, cette médiatisation, qui fut, il faut bien le dire, à la hauteur du soulagement exprimé après la libération des otages, paraît pourtant bien dérisoire au regard du dévouement et de l’humilité de ces gendarmes sagement demeurés, une fois leur mission menée à bien, en retrait de la scène publique, au regard aussi de ce qu’ont pu subir l’ensemble des victimes de ce terrible événement, enfin et surtout, au regard de la tragédie quotidienne qui se déroule de l’autre côté de la Méditerranée. Anniversaire mouvementé, cette intervention du GIGN aura incidemment permis de porter un coup de projecteur sur cette formation d’élite, il est vrai, largement connue du grand public, au prestige toutefois quelque peu terni par la ténébreuse affaire des « Irlandais de Vincennes », mais qui représente, au même titre d’ailleurs que la Garde républicaine, l’un des fleurons de la Gendarmerie.
Confrontée, comme l’ensemble des services de police européens, à la recrudescence de la menace terroriste qui caractérise le début des années 1970 (détournements d’avions, prises d’otages, attentats meurtriers…) et culmine avec le drame de Munich lors des Jeux olympiques de 1972, la Gendarmerie réagit par la mise sur pied, en avril 1974, de deux unités spécialisées dans la lutte antiterroriste et les interventions délicates : le GIGN 1 (Maisons-AIfort) et le GIGN 4 (Mont-de-Marsan). L’objectif de la gendarmerie est alors de mettre en place un GIGN dans chacune des sept régions militaires. Pourtant, assez rapidement, ce projet de multiplier et donc de diviser, voire même, presque inévitablement, de mettre en concurrence les groupes d’intervention, fut abandonné. Au contraire, après trois années d’expérimentations et d’interventions couronnées de succès (en particulier, la libération, le 4 février 1976, dans des conditions extrêmement difficiles d’une trentaine d’enfants français pris en otages dans un car de ramassage scolaire dans le désert de Djibouti), la Direction générale de la Gendarmerie décida, par une circulaire du 27 juin 1977, de fusionner les deux unités existantes de manière à constituer un seul et unique GIGN. La force d’intervention ainsi façonnée est, depuis 1984, implantée à Satory et se compose, à l’heure actuelle, de 5 officiers et 82 sous-officiers (soit quatre groupes opérationnels d’une quinzaine de gendarmes et un groupe hors rang chargé des tâches administratives, de l’entretien et de la gestion des matériels), objets d’une sélection rigoureuse et d’un entraînement intensif, et qui, par un système de mise en alerte, peuvent être engagés en permanence sur l’ensemble du territoire.
La décision prise en 1977 constitue une date importante dans l’histoire de cette formation d’élite, même si l’acte de naissance du GIGN se situe plutôt le 10 mars 1974, lorsque, pour la première fois, des éléments de l’équipe commando régionale d’intervention (unité créée, le 10 septembre 1973, au sein du groupe 1/2 de gendarmerie mobile de Maisons-Alfort, et qui deviendra, quelque temps plus tard, le GIGN 1), furent dépêchés, sous les ordres du lieutenant Prouteau, pour neutraliser un forcené armé retranché dans un appartement HLM à Ecquevilly (Yvelines). L’une des particularités du GIGN réside, en effet, dans ce caractère de force spéciale relativement polyvalente, dans la mesure où, à côté de sa fonction principale d’unité capable de lutter efficacement contre le terrorisme et les prises d’otages, le groupe est susceptible d’apporter son concours aux unités territoriales dans le cas de missions nécessitant le recours à des techniques et des moyens particuliers d’intervention (mutineries dans les prisons, arrestations et transfèrements d’individus dangereux, neutralisations de forcenés…). En vingt années d’existence, le GIGN a ainsi effectué près de 650 interventions, au cours desquelles environ 350 otages ont été libérés et pas moins de 550 malfaiteurs arrêtés.
Le GIGN fait partie du Groupe de sécurité et d’intervention de la gendarmerie nationale (GSIGN), formation parachutiste (d’environ 350 militaires) implantée à Satory et rattachée à la légion de gendarmerie mobile d’Île-de-France, qui se compose également, outre un groupe instruction (assurant notamment la formation des gendarmes affectés en ambassade et celle des militaires étrangers effectuant des stages au GSIGN), du Groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR) et de l’Escadron parachutiste d’intervention de la Gendarmerie nationale (EPIGN). Depuis sa création le 5 janvier 1983, le GSPR est chargé d’assurer en toutes circonstances, avec ses 5 officiers et 100 sous-officiers, la sécurité immédiate du président de la République et de ses proches, tant dans la vie officielle que dans la vie privée, aussi bien à l’occasion de ses déplacements sur le territoire national que dans un pays étranger. Succédant, depuis le 1er janvier 1984, à l’escadron de gendarmerie mobile 9/2 de Mont-de-Marsan créé au début des années 1970, l’EPIGN a pour mission d’intervenir, grâce à ses effectifs relativement importants (4 officiers et 124 sous-officiers) et ses moyens militaires aéromobiles, en appui ou en renfort du GIGN (pour établir une zone de sécurité autour du lieu d’intervention, opérer des mouvements de couverture ou de diversion…) et du GSPR (pour constituer une réserve d’intervention, assurer la sécurité extérieure des lieux de résidence…).
L’EPIGN peut également assurer la sécurité rapprochée de hautes personnalités, fournir des renforts de protection auprès des représentations diplomatiques françaises à l’étranger, apporter son concours à des opérations de lutte contre la délinquance et être amené à participer, au même titre que toute autre formation de gendarmerie mobile, à des opérations de maintien et de rétablissement de l’ordre. ♦