La question du Nord Mali ne peut bien se comprendre qu’en recherchant comment le Sahara fut décolonisé et comment l’Algérie dut faire face à une décennie sanglante d’islamisme radical. La prochaine visite du président de la République à Alger peut permettre de retrouver les racines d’intérêts communs.
Cinquante ans après 1962 : un rapprochement franco-algérien souhaitable mais difficile
Fifty Years after 1962: A Desirable but Difficult Franco-Algerian Reunification
The question of North Mali cannot be well understood without first researching how the Sahara was decolonized and how Algeria faced a bloody decade of radical islam. The next visit of the president of the Algerian Republic could permit a retreival of roots of common interests.
L’histoire n’est pas tournée vers le futur, mais l’actualité nous apporte des informations nouvelles qui complètent les faits passés et qui fournissent des pistes de réflexion pour essayer de prévoir un avenir possible. Réfléchissons donc à partir des dernières nouvelles apportées par la presse, mais davantage en remontant vers le passé – qui est connu – qu’en descendant vers l’avenir, qui ne l’est pas.
Des troubles croissants au Sahel
Le point de départ nous est fourni par la situation du Sahara, vaste zone inhospitalière de l’Afrique, où les frontières des États postcoloniaux, d’abord tracées par les colonisateurs, apparaissent de plus en plus artificielles. Depuis quelques années, le développement des activités de groupes armés islamistes, dont le principal est l’AQMI (Al-Qaïda au Maghreb islamique), issu du GSPC (Groupe salafiste pour la prédication et le combat) algérien, a chassé d’Afrique le rallye Paris-Dakar, et multiplié les attentats et surtout les enlèvements d’otages européens. Notamment Michel Germaneau, enlevé le 19 avril 2010 au Niger et assassiné le 24 juillet en Mauritanie, puis les quatre otages capturés le 16 septembre 2010 dans la ville minière d’Arlit au Niger et les deux autres enlevés à Niamey qui trouvèrent la mort quand leurs ravisseurs furent rattrapés à la frontière du Mali le 8 janvier 2011. Mais depuis le début de l’année 2012, la situation du Mali s’est considérablement aggravée avec l’offensive de plusieurs groupes armés touaregs et/ou islamistes (dont l’AQMI), qui ont répondu au coup d’État militaire du 22 mars 2012 en s’emparant subitement de la moitié nord du territoire malien, avec les villes de Gao et de Tombouctou. Le nouveau régime islamiste s’est rapidement fait connaître en imposant la charia (y compris les peines de lapidation et de mutilation), et en détruisant les lieux saints les plus réputés au nom de la lutte contre l’idolâtrie. Parmi les groupes vainqueurs, le Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA), mouvement touareg non islamiste, s’était distingué en proclamant unilatéralement la fin des opérations militaires le 5 avril, et l’indépendance de l’Azawad (le pays touareg) le 6, mais cette décision fut rejetée unanimement par tous les partis maliens et par la communauté internationale. Le 26 mai, il annonça sa fusion avec un autre groupe touareg de tendance islamiste, Ansar Eddine, mais dès le 29 mai il revint sur cet accord. Puis le MNLA fut chassé à la fin juin des deux villes conquises par le Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), allié d’Ansar Eddine et d’AQMI. Ce même Mujao annonça le 1er septembre l’exécution du consul d’Algérie à Gao, enlevé par lui le 5 avril avec six employés de son consulat (dont trois avaient été libérés le 16 juillet).
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