C’est l’hybridation des modes d’affrontement, la fugacité des agressions et la fluidité des théâtres de tension qui explique cette impression de crise permanente non maîtrisée. Y faire face, c’est bien sûr essayer de comprendre en amont mais surtout se tenir prêt à répondre à l’imprévu.
Quelle place pour l’anticipation de crise ?
What Place for Crisis Anticipation?
It is the hybridization of styles of confrontation, the fleetingness of aggression, and the fluidity of theaters of tension that explains this feeling of permanent, uncontrolled crisis. To face it is to try and understand it in advance, but to above all stay ready to respond to the unexpected.
« La prospective est plus un art qu’une science. Son sujet, l’avenir, n’est pas une matière inerte, mais un fluide, une matière mouvante et dynamique ayant peu de pitié pour l’immodestie de certaines prévisions ». Geoffrey Delcroix : « Prospective, défense et surprise stratégique », Travaux et recherches de prospective, n° 25, 2005.
La soif de prédire l’avenir, la volonté de se préparer dans les meilleures conditions à faire face aux changements et aux bouleversements futurs, est une constante humaine qui couvre tous les champs d’activité, civils comme militaires. En effet, l’anticipation de crise s’est imposée dans des domaines variés tels que l’économie, l’environnement, la santé, l’industrie… Sur le plan militaire, l’évaluation du contexte géopolitique constitue le fondement de toute stratégie de défense, celle des États comme celle des organisations militaires grâce à des publications telles que le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, actuellement en cours de révision, ou la Quadrennial Defense Review (QSR) aux États-Unis. À titre d’exemple, l’Alliance atlantique avait publié en 2009 une étude portant sur quatre scénarios possibles : Multiple Futures Project, 2009. De façon analogue, le Plan prospectif à trente ans (PP30), élaboré par la Délégation générale pour l’armement, avec le concours des armées, vise à identifier les besoins et à orienter les études futures. S’ils n’ont pas pour ambition de « rouvrir les livres sibyllins » (sous l’antiquité romaine, le Sénat consultait en cas de danger exceptionnel un recueil d’Oracles, appelé Livres sibyllins, cadeau de la Sibylle de Cumes au roi Tarquin), ces travaux prospectifs peuvent être considérés cependant comme une étape vers le développement d’outils censés répondre au plus large spectre des défis à venir. Pourtant, la surprise que constituent les révolutions arabes de 2011 ou les attentats du World Trade Center survenus dix ans plus tôt prouvent que ces systèmes prédictifs ont atteint leurs limites.
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