L’incertitude stratégique que beaucoup ressentent résulte de fragiles équilibres antérieurs désormais rompus, de l’apparition de nouveaux acteurs et de nouvelles frictions mais surtout de la crise générale du politique qui est la marque d’un monde en transition rapide.
Considérations sur l’incertitude
Considerations on uncertainty
Strategic uncertainty that many feel is the result of previous fragile balances now broken, the emergence of new actors and new frictions, but especially of the general political crisis that is the hallmark of a work undergoing a rapid transition.
La situation actuelle est caractérisée par une multiplication des dimensions géostratégiques, des acteurs et de leurs relations. Cela aboutit à deux résultats opposés, mais également fâcheux. D’une part, il y a un brouillage généralisé entre l’intérieur et l’extérieur des sociétés et, à l’intérieur de chacune d’elles, les frontières entre le privé et le public, entre le civil et le militaire, etc. sont de plus en plus floues. D’autre part, la tendance est à la séparation entre des instances dont le dialogue est la base du lien social : État et citoyen, élites technocratiques ou internationalisées invoquant la contrainte des marchés ou les opportunités lointaines et, en face, des mouvements populistes, protestataires et protectionnistes tentées par la fermeture ou le repli. S’y ajoute l’affaiblissement des instances de médiation (partis politiques, syndicats, autorités judiciaires et administratives), le tout aux dépens de l’autorité, de la réciprocité et de la confiance. C’est une évolution qui vient de loin.
L’ordre westphalien était miné par l’inégalité des grands et des petits États, par les conflits des empires entre eux, par la révolte des nationalités et des révoltes sociales, par l’interdépendance économique et la contagion des crises.
L’ordre de Yalta, imposé par la force, était miné par les volontés d’indépendance nationale, par les contacts entre les sociétés et leur évolution du temps de la guerre froide que le général Beaufre décrivait ainsi : « La grande guerre et la vraie paix sont peut-être mortes ensemble ». Il l’appelait la « paix-guerre » et Raymond Aron « la paix-belliqueuse ». L’ordre de Yalta (qui n’avait régné qu’en Europe) se fissurait déjà lorsque Kissinger, en 1968, écrivait : « Nous vivons une époque où les non-alignés demandent autant de protection que les alliés et les alliés autant de liberté d’action que les non-alignés ».
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