Depuis près de deux décennies, le professeur Pierre Pascallon, ancien député, a porté ses travaux sur la défense, avec un intérêt tout particulier pour les drones. Ainsi, en 1999, il y avait consacré un premier colloque, suivi d’autres manifestations autour de ce sujet. Avec cet ouvrage à la présentation soignée, il restitue les actes du colloque organisé le 3 décembre 2012 et portant sur l’avenir des drones militaires. Le résultat est tout à fait convainquant et permet d’avoir un travail de « référence » sur ce thème. On peut juste regretter que certains schémas issus des exposés réalisés ne soient pas d’une lecture aisée. Il n’en demeure pas moins que ce livre permet d’avoir un point de situation complet, tant sur l’état actuel de l’emploi des drones que sur les perspectives futures dans les opérations à venir. De plus, grâce à un large éventail d’intervenants, outre la position française, le lecteur y trouvera des informations venant des États-Unis et d’Israël, pays experts en la matière.

L’expérience acquise par les armées françaises depuis le Kosovo, concernant les drones, permet aujourd’hui d’avoir du recul et une bonne appréciation des avantages et inconvénients des systèmes aériens sans pilote. Ainsi, il faut rappeler en préambule que le taux d’attrition reste encore élevé, y compris pour les forces américaines, et que la menace air-air reste une vulnérabilité des drones. Cependant, les avantages conférés par ces engins nouveaux les rendent désormais indispensables dans la plupart des opérations, tant pour l’acquisition du renseignement que pour le combat lui-même. Et de ce fait, la panoplie ne cesse de s’élargir et de se sophistiquer, en allant du microdrone, au drone de combat embarqué dont le développement est en cours aux États-Unis, sans oublier les drones à voilure tournante.

Grâce à la restitution des exposés, la question de l’avenir des drones ne se pose plus. Ils sont une réalité tangible pour les forces armées françaises depuis plus d’une décennie, avec le paradoxe de ne pas disposer d’une capacité industrielle nationale ou européenne complète dans ce domaine, obligeant à nous fournir auprès d’Israël pour les Harfangs actuels employés au Sahel et des États-Unis pour les Reaper qui viennent d’être commandés et dont les deux premiers exemplaires devraient être déployés d’ici peu au Mali.

La mise sur pied d’une véritable filière industrielle s’impose d’autant plus que les Européens disposent des compétences comme l’a prouvé le succès des premiers vols du démonstrateur de drone de combat Neuron conçu par Dassault avec ses partenaires européens. Il serait désastreux de rater les prochaines étapes – notamment pour un drone Male – et donc de se priver d’une capacité essentielle pour préserver un minimum d’autonomie stratégique à la France et à l’Europe. Certes, de nombreuses questions restent posées comme l’acceptation des drones, notamment ceux qui sont armés, par les opinions publiques. Il en est de même au sein des Armées de l’air avec la place faite au pilote – désormais à terre – lorsqu’il conduit ce type de système. Il subsiste également de nombreux écueils, comme la définition d’une réglementation aérienne spécifique aux drones ou encore la mise en place d’une approche européenne des efforts plus fédérative.

Le mérite de cet ouvrage est donc de mettre en perspective l’ensemble de ce chantier majeur que constitue le drone aérien et de donner ainsi les clés de compréhension d’une problématique récente sur le plan doctrinal, technologique et industriel si dimensionnant pour les capacités de défense de demain. Ce livre y contribue de main de maître.