Billet - Asymétrie
Asymétrie - Nom féminin apparu au début du XXIe siècle pour désigner, sous forme d’étonnement surjoué, la vieille réalité de la guerre et des combats que nos armées sur-technologisées et managées ont désapprise. La surprise ne date pas d’hier. Prenons cette scène qui se déroule à Paris dans la matinée du 25 août 1944, rapportée par Pierre Bourdan dans son Carnet de retour (Éditions Pierre Trémois, 1945). Son unité vient de déboucher sous la ligne de métro qui surplombe le boulevard de Grenelle, et la voilà prise sous un feu nourri qui vient du viaduc, un « tir bien ordonné et soutenu ». Flottement chez les hommes de la 2e DB : non parce qu’il s’agit d’un combat dans la population, comme se gaussent les beaux esprits lorsqu’il s’agit d’occuper les cités d’Orient, mais parce que l’armement du détachement et sa puissance ne sont pas prévus pour une telle occurrence.
« Impression absurde, irritante, humiliante. Nous étions les uns dans nos chars, les autres dans le half-track. Nous avions toutes les apparences d’une écrasante supériorité offensive et défensive sur des ennemis qui ne pouvaient être plus d’une poignée et n’auraient pas tenu deux minutes contre le plus faible de nos véhicules. Et pourtant nous nous trouvions dans une posture ridicule, vulnérables, visibles et ne sachant où et combien étaient ces ennemis invisibles et singulièrement agissants ».
« Il y a, dans la guerre moderne, une spécialisation dans l’accoutumance au danger. L’esprit du combattant se prémunit et s’affermit contre le genre de riposte spécialement destinée à son arme et le danger particulier qu’il représente pour lui. Mais le même homme que son arme et son emploi ont préparé psychologiquement à un certain ordre de danger se trouvera moins ferme devant un péril même moindre, qui est hors de son champ de prévisions et de sa spécialité. Ce danger-là peut créer chez lui l’angoisse ou le désarroi ».
Il reste 31 % de l'article à lire