Billet - Éloge du diplomate français
Diplomate : personne chargée de fonctions diplomatiques. Le Robert complète cette tautologie de la citation suivante : « Un diplomate qui s’amuse est moins dangereux qu’un diplomate qui travaille ». De fait, la France couva longtemps de singuliers commis, à l’exemple du cardinal de Bernis qui s’amusa avec Casanova des faveurs de deux religieuses, puis travailla à un fort inopportun renversement d’alliances que ceux qui voudraient nous envoyer mourir pour Doha feraient bien de méditer. Mais un de leurs collègues, Jean Giraudoux, n’a-t-il pas écrit : « Un cheval passa. Les poules suivirent, remplies d’espoir » ?
Prenons son ami Eirik Labonne. Qui se souvient de lui, à part la ville de Bourges dont une rue porte son nom ? Il fut notre premier ambassadeur à Petrograd auprès des Soviets, puis nommé à Ankara à l’avènement d’Atatürk, à Barcelone auprès de la République espagnole, puis de nouveau ambassadeur à Moscou. C’est au Maroc qu’il donna le meilleur de lui-même, une première fois en 1929 comme Secrétaire général du gouvernement marocain sous le régime du Protectorat. Il y fonda le Bureau de recherches et de participations minières, sujet qui lui tenait à cœur puisqu’il dirigea par la suite le Comité d’organisation industrielle d’Afrique. Il fut un des rares qui comprirent l’enjeu stratégique du pétrole saharien : « Notre Oural, c’est l’Atlas », aimait-il à répéter.
Labonne revint au Maroc comme Résident général de mars 1946 à mai 1947. Il y reprit la politique de Lyautey et envisagea la création d’une zone industrielle algéro-marocaine. Il fit libérer les militants nationalistes, ce qui lui valut bien des inimitiés. Il fut rappelé sous la pression des colons parce qu’il avait permis au Sultan d’évoquer en sa présence la perspective d’une indépendance. On aurait pu lui appliquer cette réflexion de Michelet sur Scipion l’Africain : « Il était de ces hommes aimables et héroïques, si dangereux dans les cités libres ».
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