Hong-Kong 1997-Fin de siècle, fin d’un monde ?
Le 1er juillet 1997 verra, avec la restitution de Hong Kong à la Chine, le terme hautement symbolique d’une ère marquée en son début par « l’arrogance britannique et l’humiliation chinoise ». Cinq auteurs font ici le point sur la situation de la colonie et s’interrogent sur les suites possibles d’un événement qui ne se situe plus dans le long terme.
Chacun sait que ce petit territoire fait partie des dragons. Il reste que les rappels effectués aux pages 61 et 117 à 119 sont impressionnants : population multipliée par 12 en moins de 50 ans, 3e place financière mondiale et 10e puissance commerciale, 560 banques présentes et 49 compagnies desservant l’aéroport, le tout sur 1 000 kilomètres carrés, voilà qui évoque l’image de la poule aux œufs d’or. Les vieux sages de Pékin en sont conscients et, Tien-an-Men ou pas, agissent avec prudence, tandis que les représentants de Londres ont lâché pas mal de lest jusqu’à l’arrivée en juillet 1992 du gouverneur Chris Patten, politique et non plus fonctionnaire, désireux de reprendre les choses en main ; mais il est déjà tard, car la « loi fondamentale » qui organise l’avenir est là et le fait que Deng Xiaoping ait qualifié le texte de « chef-d’œuvre créatif » n’est qu’à moitié rassurant, même si le statut de « région administrative spéciale » confère un haut degré d’autonomie (par exemple, Hong Kong émettra ses propres passeports et les écoles privées religieuses seront maintenues).
Descartes n’eût pas été à l’aise dans cette affaire toute en courbes. Les titres de certains chapitres sont révélateurs : zigzags de Pékin, méandres de Londres… Le pragmatisme règne et les paradoxes abondent. Ainsi les farouches extrémistes de la Révolution culturelle n’ont pas levé le petit doigt contre l’« épine colonialiste plantée dans le corps de la Chine », alors qu’il « suffisait de couper l’eau potable pour que la colonie meure de soif » ; la plus vieille démocratie a pris soin de ne pas consulter la population sur son sort et a préféré s’entendre directement avec le dernier des grands empires totalitaires, ce qui fait penser aux transferts de provinces du temps de nos rois. Du coup, les intéressés, qui s’étaient jusqu’alors adonnés plus aux délices du commerce qu’à ceux de la démocratie (si bien qu’une seule solution n’a jamais été envisagée : l’indépendance !), s’interrogent sur les vertus réelles de leur « libération » et ont tendance à diriger leurs revendications plus « contre les appétits de leurs compatriotes du continent que contre ceux de Sa Majesté ». Certains commencent à voter avec leurs pieds, tandis que la Grande-Bretagne est peu soucieuse de voir affluer sur son sol une nouvelle vague d’immigrants.
Or, l’avenir de Hong Kong présente un intérêt majeur en tant que test. « Les Cantonais regardent vers Hong Kong et les Chinois vers le Guangdong » (qui est son arrière-pays). Il va s’agir de savoir si, à partir de ce « laboratoire de l’économie moderne », les Chinois sont aussi capables que les Japonais d’accéder à la prospérité. Un autre dragon est très attentif : Taïwan.
Ce petit ouvrage collectif ne prétend pas révéler le détail de ce qui se passera après 1997, mais il fournit tous les éléments permettant d’évaluer l’enjeu et d’imaginer les risques d’une opération dont tout porte à croire que, dans trois ans, elle fera plus d’une fois la une de nos journaux. ♦