Politique étrangère de la France : diplomatie et outil militaire (1871-1991) / Les relations internationales depuis 1945
Nous croyons devoir signaler à l’attention de nos lecteurs la réédition de deux précieux ouvrages de référence, que nous avions eu l’occasion de présenter déjà dans cette revue, respectivement dans ses livraisons de mars 1988 et d’avril 1991.
Le premier venait alors d’être édité superbement par l’Imprimerie nationale dans la prestigieuse collection qui a entrepris de reconstituer l’histoire de la politique étrangère de la France depuis 1871, sous la direction du professeur Jean-Baptiste Duroselle, membre de l’Institut et maître incontesté de l’École française d’histoire contemporaine. Sa réédition dans le format d’un livre de poche va très utilement en autoriser l’accès à un public beaucoup plus large que précédemment. Elle a aussi permis au professeur Maurice Vaïsse, qui est un expert reconnu internationalement de l’histoire de l’armement nucléaire, de prolonger jusqu’à nos jours l’analyse du rôle de « l’outil militaire » dans la diplomatie française, analyse arrêtée dans la précédente édition à l’année 1969, c’est-à-dire au moment où le général de Gaulle avait quitté les affaires.
Il a ainsi pu ajouter au texte précédent un chapitre fort bien venu, dont le titre : « Un outil polyvalent au service d’une puissance moyenne (1969-1991) », résume bien l’orientation générale de leur réflexion, laquelle s’articule autour des trois idées suivantes : « La continuité et le consensus », « Une ambition de différence », « Une panoplie complète de moyens ». Nos auteurs terminent ce chapitre nouveau par la constatation que la politique de la France est « à l’heure des choix », et en particulier que « l’aggiornamento de notre outil nucléaire est inéluctable ». Cependant, permettons-nous d’ajouter, si ces choix sont de plus en plus nécessaires, ils sont de moins en moins faciles lorsqu’on considère les incertitudes chaque jour plus redoutables de la situation internationale, tant dans le Nord, avec l’éclatement maintenant consommé de l’empire soviétique et l’entrée en déshérence de son arsenal nucléaire, que dans le Sud, avec la prolifération déjà avancée de missiles balistiques à portée intermédiaire, capables d’être les vecteurs d’armes de destruction massive. Il n’en reste pas moins que la conclusion de cette réédition fort bien présentée, malgré son format réduit, et qui comporte, comme l’édition originale, des notes abondantes, un index très bien fait et de nombreuses cartes renseignées, mérite d’être méditée à tous les échelons : « La France, face aux changements de la stratégie internationale, ne doit pas mettre sa diplomatie au service de sa défense, mais bien au contraire garder comme principe que les armées sont faites pour servir la politique des États ».
Cette politique des États, telle qu’elle a été conduite depuis 1945, le professeur Maurice Vaïsse l’expose de façon très complète et avec beaucoup de clarté dans le second des ouvrages que nous présentons aujourd’hui, dont la qualité didactique est d’autant plus remarquable que, malgré son format là encore réduit, il est assorti, comme le précédent, d’index fort bien faits, de cartes bien renseignées et d’une excellente bibliographie sélective, ainsi que de nombreux encarts récapitulatifs. Sa réédition, qui témoigne après un délai si court du succès de la première édition, a bien entendu poursuivi jusqu’à nos jours l’exposé des relations internationales. C’est ainsi qu’elle se termine par un nouveau chapitre qui brosse « le paysage géopolitique nouveau et contrasté » devant lequel nous nous trouvons actuellement, marqué par « la fin du système Est-Ouest », « la persistance de l’affrontement Nord-Sud », et l’apparition d’« un monde unifié et balkanisé à la fois ».
Voici donc deux ouvrages particulièrement utiles à tous ceux qui s’intéressent à la géopolitique, car une prospective lucide dans ce domaine doit plus que jamais de nos jours être basée sur une parfaite connaissance de l’histoire des relations internationales. ♦