Inde. Les années Rajv Gandhi
Rajiv Gandhi, héritier d’une lignée prestigieuse d’hommes d’État, succéda à sa mère Indira, abattue par ses gardes du corps sikhs, en octobre 1984. Il connaît en décembre de la même année un véritable triomphe électoral. L’homme est jeune (40 ans), son discours est moderniste, son programme ambitieux : porter l’Inde au seuil du véritable développement à l’aube du XXIe siècle. Sa campagne « anticorruption » captive les masses attentives au comportement de ceux d’en haut. L’économie progresse à des rythmes inégalés. C’est pour le jeune Premier ministre qu’a donné le Congrès au pays, 450 jours d’état de grâce jusqu’en janvier 1986.
Mais peu à peu, cette belle mécanique s’enlise. Le Penjab s’enflamme contre la faiblesse de Rajiv Gandhi, accusé d’esprit partisan. Des dissensions naissent au sein du Congrès, cette machine à garder le pouvoir est ébranlée dans son credo socialisant et s’inquiète du fait que Rajiv Gandhi n’apparaisse plus comme un « gagneur ». V.P. Singh, le vertueux ministre des Finances, pourchasseur des fraudeurs du fisc, est déplacé à la Défense, mais cette mesure va se retourner contre le Premier ministre. En effet, à son nouveau poste, V.P. Singh va découvrir de nouvelles affaires, alors que le dossier Bofors prend de larges proportions. La sécheresse de l’été 1987, la plus sévère depuis l’indépendance indienne, aggrave la situation économique et sociale. À partir de 1988, le Congrès va subir une série de revers électoraux qui semblent annoncer son déclin. Les élections générales de novembre 1989 voient la défaite du parti naguère hégémonique.
Durant les cinq années pendant lesquelles Rajiv Gandhi est resté au pouvoir, la population de l’Inde s’est accrue de 75 millions d’habitants. Philippe Humbert attribue justement à ces mutations économiques, sociales, régionales, la responsabilité principale du changement de climat politique. Du fait de l’inégale répartition des fruits de la croissance, la classe moyenne s’est en partie détachée du Congrès et les couches paysannes s’en sont éloignées. L’auteur décrit avec précision l’évolution économique de l’Inde. Il a raison de souligner sa faible ouverture aux investissements étrangers. Il insiste peu sur la position régionale de l’Inde comme sur sa politique extérieure. Cela est dommage. Cette réserve faite, son ouvrage est vivant, documenté et bien articulé. Si l’Inde souffre de la présente conjoncture internationale, qui l’éloigne de notre attention, n’oublions jamais que la « plus grande démocratie du monde » sera peuplée de 2 milliards d’habitants en l’an 2000 et aura consolidé sa place de huitième puissance économique mondiale. ♦