Madame le Général
J’ai rencontré le capitaine Valérie André il y a maintenant plus de trois décennies ; elle pilotait un hélicoptère et assurait les évacuations sanitaires urgentes au Tonkin, dans la mesure de ses moyens car, malgré ses immenses qualités, elle n’avait pas le don d’ubiquité et son hélicoptère était souvent le seul disponible. Personnellement, je commandais un Landing craft tank – bateau plat, pansu, lent, comme l’a écrit un camarade – sur le fleuve Rouge. Un certain nombre d’années plus tard, nous nous sommes retrouvés autour d’une table afin d’étudier comment on pourrait « promouvoir la femme militaire » : il était logique que le général Valérie André fût l’élément moteur d’une telle promotion.
Et maintenant, nous avons le plaisir de lire ses mémoires, c’est-à-dire le chemin parcouru par une femme hors du commun qui a toujours eu l’action, le devoir et le dévouement comme éléments fondamentaux d’une ligne de conduite dont elle n’a jamais dévié. Même si, actuellement, les biographies et autobiographies font florès, celle de Valérie André est à noter tout particulièrement, car il s’agit de celle d’une femme qui a risqué sa vie en permanence, dans l’action, pour sauver celle des autres ; une abnégation telle qu’encore récemment, elle ne réalisait pas toujours que les autres femmes, dans leur ensemble, ne sont pas comme elle : je me rappelle son étonnement et même sa peine lorsqu’une jeune femme médecin militaire lui avait déclaré qu’elle ne se sentait pas parfaitement apte à exercer son métier sur un bâtiment de guerre à la mer pendant de longues semaines.
Le lecteur pourra donc suivre pas à pas cette vie exemplaire, à travers les événements graves, dramatiques même, que la France a connus depuis cette sombre année où la jeune Valérie refusa de rester en zone occupée par les Allemands. Personnellement, j’ai lu de bout en bout sans halte cet ouvrage préfacé par une « bonne plume indochinoise », Jean Lartéguy : non seulement il est passionnant, mais bien évidemment il est source d’une nostalgie certaine.
In fine, Madame le Général fait le point des mesures à appliquer ou à mettre à l’essai dans les armées pour y augmenter de façon significative la participation des femmes. Peut-être ses réflexions sur ce sujet feront-elles l’objet d’un autre livre lorsque plusieurs années d’expériences auront porté leurs fruits ?♦