China’s Political-Military Evolution, The party and the military in the PRC, 1960-1984
Attaché des Forces armées américaines en Chine au début des années 1980, le colonel Monte R. Bullard fut témoin des premiers changements qui allaient progressivement conduire l’Armée populaire de libération (APL) à abandonner son pouvoir politique aux civils pour se consacrer à des tâches plus spécifiquement militaires. Ce passage d’une armée qui, l’on s’en souvient, participa activement à la révolution culturelle et porta Hua Guofeng au pouvoir après la mort de Mao Zedong, vers une armée régulière constituée d’experts des affaires militaires et de loyaux serviteurs de l’État, est un pas important vers la modernisation de la défense en Chine.
Le système militaire qui résulte de cette extraordinaire mutation a conduit l’auteur à effectuer une étude détaillée des relations entre élites militaires et politiques, au sein de cinq institutions : le comité central du parti communiste chinois ; les régions militaires ; les districts militaires ; les comités provinciaux du Parti communiste chinois (PCC) ; les organismes administratifs des provinces.
À l’étude des factions qui alimentent le débat politique en Chine, M. Bullard a préféré l’analyse des fonctions administratives, politiques et militaires au sein de ces institutions. Cette approche méthodologique est d’autant plus intéressante que l’organisation de la bureaucratie chinoise résulte d’un système complexe de cumuls de toutes ces fonctions, hérité d’un long passé révolutionnaire. Très étendu dans les années soixante, ce système se trouve profondément bouleversé par les réformes successives de Deng Xiaoping. Le traditionnel cumul des trois fonctions (administrative, politique et militaire) fait désormais place à deux types nouveaux : Parti-Armée et Parti-Administration. Cette organisation limite nécessairement l’étendue des pouvoirs politiques des cadres de l’Armée populaire de libération (APL). Par ailleurs, la réduction des cumuls a permis le retour des hommes de la défense dans leurs casernes.
La politique de régularisation (zhengguihua) du système militaire, politique et administratif, entreprise par Deng Xiaoping, s’est accélérée après la conférence élargie de la commission centrale des affaires militaires tenue au printemps 1985. Elle vise non seulement à responsabiliser les dirigeants dans une tâche déterminée, mais surtout à accroître le contrôle du gouvernement central sur la vie politique et militaire dans les provinces. S’il est hasardeux de croire que ces mesures assureront la stabilité politique du pays, il est toutefois permis de penser qu’en redéfinissant le rôle de chacun des acteurs du système politique, administratif et militaire, les réformistes regroupés autour de Deng Xiaoping ont rendu plus difficile l’engagement des militaires dans la politique intérieure de la Chine.