Karl Schnell : Zeppelins Fernpatrouille mit badischen Dragonern in das untere Elsass Juli 1870 [La patrouille profonde de Zeppelin et des dragons badois en Basse-Alsace en juillet 1870] ; Verlag Für Wehrwinssenschaften, 1985, 143 pages
Tout le monde connaît la longue et brillante carrière militaire et politique de l’auteur, le général d’armée Karl Schnell : candidat officier de 19 ans à Ulm en 1935, il commande une batterie pendant la campagne de France puis sur le front de l’Est, et se trouve ensuite en Italie comme breveté d’état-major. Après des études de droit et un doctorat de sciences économiques, il renonce aux affaires pour entrer dans la Bundeswehr dès sa création, et parvient en 1975 à la tête des forces alliées du secteur Centre-Europe. Il est ensuite nommé secrétaire d’État auprès du ministre fédéral de la Défense et joue, à ce titre, pendant quatre ans un rôle déterminant dans le choix de la nouvelle génération d’armes qui équipe maintenant les armées de la République fédérale d’Allemagne (RFA).
Retiré à Baden-Baden, le général Schnell vient de publier une intéressante plaquette qui rappelle un fait d’armes souvent étudié jadis mais que la fureur de deux guerres mondiales a rejeté à l’arrière-plan : la chevauchée du Comte Ferdinand Zeppelin, alors Capitaine d’état-major wurtembergeois, à la tête d’une poignée de dragons badois, en lever de rideau de la guerre franco-allemande de 1870. Le grand état-major prussien avait alors demandé à la division badoise de lever l’hypothèse d’une éventuelle invasion brusquée du Palatinat par les Français avant l’achèvement de la concentration allemande, d’où l’envoi, le 24 juillet 1986, sous les ordres du futur inventeur du dirigeable, d’une reconnaissance d’officiers partant des environs de Karlsruhe en direction de Soultz et de Wœrth. Zeppelin atteint ce dernier objectif sans rencontrer de forces importantes, et décide de son propre chef, le 25 juillet 1986 matin, d’élargir sa mission jusqu’à la voie ferrée Haguenau-Niederbronn. Mais sa patrouille a été repérée à Wœrth… Lors d’une halte à Schirlenhoff, elle est anéantie, après une belle résistance, par un peloton du 12e Chasseurs, des briscards qui ont combattu au Mexique. Seul Zeppelin parvient à échapper à la capture et à ramener le précieux renseignement : les Français sont hors d’état de devancer le déploiement allemand.
Pour restituer le climat de l’action et dépoussiérer celle-ci de l’hagiographie qui l’avait parfois recouverte avant 1914, Schnell s’est livré à un travail approfondi d’historien, appuyé sur sa parfaite connaissance d’une région, d’ailleurs située à sa porte… Il a fouillé les archives militaires des deux camps et les bibliothèques ; il est parvenu à retrouver des descendants de la plupart des acteurs et a obtenu d’eux nombre de précieux documents. Une bonne carte, des photos, des gravures, des fac-similés de lettres, de comptes rendus et de croquis viennent enrichir un texte limpide qui relate sobrement un cas concret conservant un caractère qui mérite, encore aujourd’hui, d’être médité par de jeunes officiers : en dépit des révolutions survenues dans les matériels et les techniques, bien des enseignements peuvent encore en être tirés, et le général Schnell le fait avec bonhomie et impartialité, à la lumière de son expérience de soldat.