À travers les livres - Forces nucléaires et conscription : un divorce inévitable ?
Avec son nouvel ouvrage (1) « L’Adieu aux armées », c’est un brûlot que le général Pierre M. Gallois vient de lancer contre un système de défense qui lui apparaît périmé et ruineux. Au risque de déformer encore une pensée qui apparaît déjà passablement excessive, mais à laquelle on ne peut dénier l’accent de la sincérité, résumons son argumentation.
La France entretient une armée de conscription dispendieuse et inutile. Seules possèdent une réelle capacité dissuasive ses forces nucléaires stratégiques. L’amélioration de la condition militaire, qui était d’ailleurs nécessaire, n’a fait qu’accentuer le déséquilibre que faisait peser sur le budget cette armée de masse en privilégiant les dépenses en rémunérations de personnels au détriment des investissements en capital, c’est-à-dire de la production des équipements. Nous sommes ainsi engagés dans une impasse. La poursuite de cette évolution serait fatale, elle nous conduirait à bref délai à avoir une armée de soldats sans armes valables, sans activité et de plus en plus sceptiques quant à l’utilité et à l’efficacité du service militaire.
Ainsi est mise en évidence l’erreur avec laquelle notre défense a fait bon ménage jusqu’ici : la France, tout en se dotant d’une force nucléaire, est restée attachée à l’armée du nombre parce que les états-majors n’ont pas saisi ou n’ont pas voulu opérer la mutation qu’appelait l’avènement des armes nucléaires. Tant que les cadres militaires se sont contentés de leur situation de parents pauvres de la fonction publique et les appelés du contingent de leur « prêt » misérable, la situation a été tolérable, mais à partir du moment où il faut satisfaire les aspirations de ces personnels à un plus juste salaire et où le coût des armements croît beaucoup plus vite que celui de tous les autres biens, le divorce apparaît inéluctable : nous ne pouvons plus tout à la fois poursuivre l’effort d’équipement, la modernisation de l’appareil nucléaire avec son environnement et continuer à entretenir des unités qui furent jadis conçues pour une tout autre défense et dont l’organisation reste basée sur un ordre divisionnaire qui n’a guère évolué depuis Choiseul. Compte tenu d’un budget de défense qui se situera toujours aux environs de 3 % du PNB, nous n’avons pas d’autre issue que réduire nos effectifs et opérer une transformation de la structure des armées qui, selon P.M. Gallois, ne nuira en rien à l’efficacité de notre système de défense.
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