Les investissements français dans le Tiers-Monde
La question des investissements étrangers dans le Tiers-Monde reste d’une grande actualité. La vague des nationalisations des années 1960-1970, et l’attitude de nombreux États envers les sociétés multinationales, ont assez considérablement réduit le flux des investissements vers les pays en développement. Cette évolution peut être regrettée, car elle a poussé les États à s’endetter plutôt que de recevoir chez eux des investissements étrangers avec les conséquences que nous connaissons aujourd’hui. Cette prise de conscience de l’apport de l’investissement international dans le processus de développement est désormais beaucoup plus ample, et de nombreux pays hôtes ont révisé leur législation en ce sens. Aussi, un examen des investissements français dans le Tiers-Monde est-il le bienvenu.
Mais les motifs de satisfaction ne sont guère légion : c’est ce qu’indique la série d’études réunies par le professeur Bourrinet au sein de la collection « Coopération et développement » que nous avons déjà évoquée dans les colonnes de la revue. En gros, la tendance qu’ont suivie les investissements français dans le Tiers-Monde est très proche de la moyenne des pays industrialisés : dégagement puis remontée au cours des dernières années. Ainsi en 1960, 50 % des investissements français se trouvaient concentrés dans le Tiers-Monde, part redescendue à 15 % en 1974 pour remonter à près de 24 % dans les années suivantes. Cependant, un fait est inquiétant : le recul de la part de la France dans le total des investissements des pays industrialisés. Ce recul est sensible : passage de 9 à 7 % alors que la RFA passe de 4 à 9 % et le Japon de 3 à 8 %. Du 3e rang qu’elle occupait en 1970, la France est passée au 5e en 1981. De multiples causes expliquent cette situation et bon nombre d’entre elles sont analysées ici. Les insuffisances du système français d’encouragement aux investissements sont analysées par MM. Bensoussan et Kahn, alors que J.J. Deveaud esquisse quelques solutions pour améliorer la situation. Le système français est trop exclusivement axé sur les investissements à court terme, ce qui n’apparaît guère compatible avec des engagements à long terme indispensables à la croissance des pays du Sud. Mais bien d’autres aspects de cette question sont analysés. Patrick Juillard se livre à une analyse minutieuse de l’évolution du droit international en la matière, qui illustre le changement intervenu chez les États hôtes depuis 10 ans. Charles Albert Michalet décrit les nouvelles formes d’investissements, dont l’importance croît et dont la coopération industrielle est peut-être la forme la plus importante mais non unique, ce qu’examine Charles Oman. Jean D’Herbes apporte toute son expérience pétrolière en exposant l’apport de cette coopération industrielle au développement des ressources énergétiques du Tiers-Monde. En dépit de la phase actuelle de réajustement économique que traversent maints pays du Sud, l’investissement direct doit y jouer un rôle accru : la France doit y occuper toute sa place et redoubler d’efforts.