Die Stellung der Bunderepublik Deutschland in der internationalen Politik aus polnischner Sicht 1969-1976
Si la réconciliation avec la France a été le résultat majeur de la Westpolitik allemande, mise en œuvre par le chancelier Adenauer dans les années 1950, la normalisation des relations avec la Pologne n’a pu commencer vraiment que dans les années 1970, l’Ostpolitik de la coalition sociale-libérale et la grandeur morale du geste de Willy Brandt – l’agenouillement devant le monument du ghetto de Varsovie – ont contribué de façon déterminante à lever l’hypothèque du passé qui pesait sur les rapports germano-polonais. Ce qui pourtant rapproche encore aujourd’hui les attitudes profondes qui se manifestent en France et en Pologne à l’égard de la RFA, c’est bien ce curieux mélange entre le désir profond de faire confiance à l’Allemagne nouvelle et la crainte diffuse que la montée en puissance de la RFA puisse un jour devenir à nouveau une menace pour l’équilibre européen.
Le grand mérite de la thèse de doctorat que Dieter Bingen a préparée à Bonn sous la direction du professeur Jacobsen, est de nous montrer les ambivalences de la position polonaise sur la base d’une documentation de première main peu connue et en grande partie inédite. Les analyses récentes sur la crise polonaise que l’auteur a préparées dans le cadre de son travail de recherche à l’Institut fédéral d’études soviétiques et est-européennes de Cologne, montrent la même compréhension profonde des réalités et des mentalités collectives de la Pologne que reflète le présent ouvrage. De plus, l’étude détaillée des perceptions polonaises du rôle de la RFA dans les relations internationales au cours de la première phase de la « nouvelle Ostpolitik » permet de mieux comprendre la retenue dont le gouvernement de Bonn a fait preuve lors de l’instauration de l’état de siège en Pologne, le 13 décembre 1981. La prise en compte des susceptibilités polonaises face à une Allemagne fédérale qui, à l’instar de la RDA (République démocratique allemande), s’érigerait en donneur de leçon, a certainement joué un rôle, de même que le souvenir des partages de la Pologne auxquels la Prusse a jadis participé et, avec la Russie, contribue à donner mauvaise conscience aux responsables allemands.
À ceux qui, il n’y a pas si longtemps, soupçonnaient la République fédérale de poursuivre une politique extérieure trop ambitieuse ou qui, aujourd’hui, s’étonnent de sa retenue, le chancelier Schmidt rappelle que son pays ne peut oublier deux éléments essentiels : l’héritage du passé hitlérien et la division de l’Allemagne. En raison d’un passé douloureux, il ne reconnaît pas aux Allemands le droit de juger les Polonais. Il ne veut pas que ses concitoyens soient rendus responsables d’une escalade du conflit qui risque de grever durablement le rapprochement avec le peuple polonais qui n’est qu’à ses débuts.
La modération des positions officielles de Bonn ne signifie pas que les Allemands aient été indifférents au sort des Polonais ; les nombreux dons et colis envoyés en Pologne depuis l’instauration de l’état de siège prouvent le contraire. Si l’attitude des autorités soviétiques et polonaises a moins indigné les Allemands que les Français, c’est peut-être aussi qu’elle les a moins surpris. Depuis la répression de la révolte de Berlin-Est en 1953, et l’érection du « Mur de la honte » en 1961, tout dirigeant ouest-allemand sait pertinemment que l’URSS n’est pas prête à accepter, dans un pays relevant de sa sphère d’influence, une évolution qui pourrait mettre en danger sa domination ou ses intérêts. En plus, les Allemands ont dû, avant les Polonais, faire l’expérience que l’Occident n’est pas en mesure d’empêcher la répression, par la force, de toute tentative pour échapper au carcan communiste. ♦