De Pearl Harbor à Kennedy
Ce nouvel ouvrage de Robert Lacour Gayet (lequel se mue en véritable travailleur de force dans le domaine des vastes synthèses historiques) constitue le troisième et avant-dernier volume que l’auteur consacre aux États-Unis d’Amérique (Défense nationale a consacré au premier volume une bibliographie dans son numéro de juillet 1976). L’histoire de ce pays au cours de la période considérée a ceci de particulier qu’elle se confond, ou presque, avec l’histoire mondiale. À partir de Pearl Harbor en effet, la moindre décision, la moindre démarche, et même la moindre velléité du gouvernement américain acquièrent une résonance planétaire.
Il n’était pas facile dans ces conditions, pour l’historien, de cadrer son sujet et d’éviter de se laisser entraîner dans de trop longues digressions. Robert Lacour Gayet a contourné cet écueil avec beaucoup d’habileté, en ramenant constamment son objectif sur ce qui lui paraissait l’essentiel : les réactions de l’Amérique profonde, la formation et le développement des courants d’idées, l’aspect psychologique des problèmes, et le rôle spécifique joué par les grands leaders de l’opinion.
Il le fait avec d’autant plus d’aisance qu’il connaît admirablement bien l’Amérique et les Américains pour avoir longuement vécu et enseigné dans le pays. En outre, contemporain des événements qu’il relate, il n’a pas besoin d’efforts laborieux pour imaginer le décor et l’ambiance. Autant de gagné pour mieux se consacrer à l’exploration des zones d’ombres qui recouvrent encore certaines péripéties majeures de la période.
À vrai dire, dans ce domaine de la recherche proprement dite, il se limite peut-être trop aux seuls témoignages des acteurs et figurants, négligeant quelque peu l’étude approfondie et l’analyse des documents d’archives, dont un certain nombre ont cependant déjà été livrés au public. C’est là, à vrai dire, une des constantes de la vulgarisation historique qui, tout en laissant beaucoup de place à l’interprétation individuelle de l’écrivain, a l’avantage d’aérer le récit et de rendre les personnages principaux plus présents et plus humains, surtout quand ils sont mis en scène par un conteur aussi doué et aussi averti de toutes les ficelles du métier que l’est Robert Lacour Gayet. Les portraits qu’il trace de Roosevelt, de Truman, de Mac Arthur et de bien d’autres sont incontestablement très pénétrants et, en tout cas, emporteront la conviction du lecteur.
Il faudrait avoir l’esprit mal tourné pour soupçonner Robert Lacour Gayet de sympathies et inclinations pro-américaines pouvant nuire à la stricte impartialité qui convient à un historien. ♦