Spécialiste de l’économie walrasienne, Thierry de Montbrial a jusqu’à maintenant publié des ouvrages essentiellement théoriques de haut niveau scientifique.

Avec ce nouveau livre, l’auteur, sans rien perdre de sa rigueur, s’ouvre aux grands problèmes contemporains, qu’il analyse en les replaçant à la fois dans une perspective historique et dans leur vraie dimension qui est celle des relations internationales. Ainsi aborde-t-il successivement le dérèglement du système monétaire international, la crise de l’énergie et des matières premières, enfin l’accélération de l’inflation. La thèse présentée est que la cause de nos difficultés est à rechercher dans le laxisme monétaire, tant international qu’interne, auquel ont succombé la plupart des autorités monétaires des pays développés : création incontrôlée des liquidités et niveau arbitraire des taux d’intérêt ont peu à peu désorganisé les mécanismes d’allocation de ressources.

Thierry de Montbrial n’entend pas pour autant se rallier purement et simplement aux thèmes formalistes des monétaristes. Il situe au contraire les vraies responsabilités et, ainsi qu’il le dit lui-même, il se rapproche des explications structurelles de l’inflation. Par là même l’analyse monétaire se trouve réorientée dans une voie qu’elle n’aurait sans doute jamais dû quitter. La monnaie est, en effet, une composante majeure du patrimoine des individus ; elle est donc liée étroitement à leurs comportements et à leurs décisions. Seule une structure rationnelle des taux d’intérêt, tenant compte de l’évolution des rendements réels de tous les actifs – notamment physiques – est capable de restaurer les mécanismes de régulation disparus, et de définir dans une structure de patrimoine équilibrée un volume d’encaisses monétaires à la fois raisonnable et compatible avec l’objectif de croissance retenu.

Cette attitude intellectuelle de l’auteur le met en mesure de proposer des solutions précises qui s’attaquent, non pas aux effets, mais aux causes mêmes des maux dont nous souffrons : limitation stricte des liquidités internationales, égalité des obligations entre pays, parités fixes, indexation des taux d’intérêt, etc. Ainsi, la politique monétaire doit-elle cesser d’être seulement un instrument d’action conjoncturelle pour s’inscrire dans une perspective plus longue, seule compatible avec le souci d’agir sur les causes, c’est-à-dire les structures de l’économie.

Par son cadre de pensée, comme par les propositions qu’il fait, Thierry de Montbrial rejoint la grande famille des auteurs néo-classiques qui mettent l’accent sur les règles intangibles du jeu économique. Dans un style clair et agréable, ce jeune polytechnicien, devenu – il y a un an et demi – chef du Centre d’analyse et de prévision (CAP) du ministère des Affaires étrangères, donne au lecteur cultivé, comme au spécialiste de l’économie, une excellente occasion de réflexion. Un livre à lire et à conseiller. ♦