Ma carrière autour du monde
Le curriculum vitae de Boris Eliacheff n’est pas ordinaire. D’origine russe, né à Moscou à la fin du siècle dernier, diplômé ès-sciences économiques de l’université de cette ville, journaliste, il se trouve en Europe à la déclaration de guerre de 1914 et s’engage dans la Légion étrangère en France. Détaché au bureau de l’attaché militaire russe à Paris, il retourne dans son pays à l’occasion d’une mission et y assiste aux premiers pas du régime des Soviets. Revenu en France et décidé à s’y installer, il repasse brillamment ses examens à la Faculté de Droit de Paris, prend la nationalité française, se crée de nombreuses relations dans les milieux politiques, surtout de gauche, puis se trouve chargé de différentes missions économiques et commerciales en Amérique latine, où le surprend l’armistice de 1940. Rallié à de Gaulle dès le 20 juin, il devient délégué de la France libre aux États-Unis pour la côte du Pacifique. En 1944, il est nommé consul de France et conseiller commercial en Australie, pour retrouver ensuite son ministère d’origine, qui le charge à nouveau de missions, tantôt temporaires, tantôt de plus longue durée, en Amérique centrale, en Afrique, en Indochine, dans les pays arabes et en Israël. Il prend enfin, en 1957, une retraite qui paraît bien méritée.
Tant de pays visités, de situations vécues, de gens rencontrés, constituent le fonds où Boris Eliacheff a puisé pour rédiger ses souvenirs. Leur intérêt réside surtout dans leur variété. On n’y trouve guère de « révélations », ni rien non plus qui puisse utilement servir un jour de témoignage pour l’histoire. Les conversations, par exemple, sont manifestement, et quoi qu’en dise l’auteur, reconstituées de mémoire, à la lumière de ce qui, concernant les interlocuteurs, est plus ou moins tombé depuis dans le domaine public. Il en est de même des anecdotes et, plus généralement, des appréciations portées sur les événements, dont on a l’impression qu’elles ont été très souvent légèrement retouchées après coup pour mettre en lumière la clairvoyance du mémorialiste. Mais quoi qu’il en soit de ces péchés véniels, commis sans malice par un homme plutôt satisfait, tout compte fait, et à juste titre, de son existence, on ne manquera pas d’être intéressé par cette sorte d’enregistrement qu’il nous livre des échos d’un demi-siècle mouvementé. ♦