2 000 ans de fortifications françaises
Le colonel Pierre Rocolle, depuis Le béton paye-t-il ? (1939) en passant par Le béton a-t-il trahi ? (1950), s’est toujours intéressé à la fortification. S’il consacra sa thèse de troisième cycle à Dien Bien Phu, il revint à la fortification pour soutenir sa thèse de doctorat ès lettres. C’est le fruit de ses recherches échelonnées sur de longues années qui paraît maintenant sous le titre de 2 000 ans de fortifications françaises depuis l’époque romaine jusqu’à nos jours.
C’est un immense travail d’érudition qui voit ainsi le jour et qui sera désormais un ouvrage de référence pour qui veut se documenter non seulement sur l’évolution de cette fortification (à travers ses quatre âges, ceux des autodéfenses, des places, des forts, des positions), mais aussi grâce à un index précis, sur les multiples châteaux-forts, places fortes, forts détachés, dispersés sur le territoire national et à la périphérie.
Près de la moitié de l’ouvrage, soit les six premiers chapitres, est consacrée à l’âge des autodéfenses, c’est-à-dire à la fortification médiévale, depuis son réveil au Xe siècle jusqu’à l’apparition du bastion. Influences romaine et normande (châteaux à motte) président à cette renaissance, mais aussi souvenirs byzantins et arabes. Puis l’auteur décrit l’évolution, conséquence des progrès de l’artillerie, vers une fortification bastionnée dont Vauban constitue l’ultime étape. Vauban dont on peut se demander si ses talents de preneur de places n’ont pas eu finalement raison de sa technique d’ingénieur.
Si l’auteur passe relativement plus vite sur les deux périodes les plus récentes, il n’en consacre pas moins des développements fort intéressants au système Séré de Rivières dont on a pu dire que, si l’obus-torpille l’avait rapidement périmé sur le plan technique, il avait conservé sa valeur stratégique, étant par sa conception même, lié à la manœuvre, ce qui n’était probablement pas le cas de la ligne Maginot, techniquement au point mais « a-stratégique ».
La lecture de cette thèse, bourrée de références et de notes infrapaginales, aurait été facilitée si les multiples croquis qui l’égayent n’avaient pas été rejetés dans le second tome qui contient également une imposante bibliographie sur la fortification en général et sur 480 lieux fortifiés. ♦