La paix est indivisible : les Super-Grands ne peuvent prétendre la révérer en Europe continentale et la bafouer à sa porte méditerranéenne en continuant à y alimenter les tensions sous couvert de l'exercice d'un droit de police. Il convenait donc de permettre aux riverains non européens de cette mer défaire entendre leurs voix à la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe. L'auteur fait l'historique de ce dialogue et en dresse le bilan, bien mince il est vrai, à la veille de la réunion de Belgrade qui va faire le point des résolutions signées à Helsinki il y a deux ans.
Le dialogue euro-méditerranéen : une occasion manquée ?
Sous l’impulsion constante d’un certain nombre de ses États participants, la C.S.C.E. admit le principe de l’indivisibilité de la sécurité ainsi que de la coopération internationale. Elle veilla à paraître comme une entreprise non pas d’eurocentrisme aveugle, mais d’ouverture aux préoccupations générales du monde extérieur. Aussi l’Acte final fourmille-t-il de dispositions soulignant la dimension universelle de la plupart des problèmes qu’il aborde. Dans le même ordre d’idées, une place privilégiée fut réservée à une seule région extra-européenne bien spécifique : la Méditerranée. La C.S.C.E. a, en effet, procédé aussi à une tentative originale de définition des rapports multilatéraux euro-méditerranéens. Notre propos consistera à dégager les données fondamentales de cette tentative et s’efforcera d’en évaluer les effets concrets à la veille de la réunion diplomatique de Belgrade.
Le facteur méditerranéen de la C.S.C.E. peut être défini par un ensemble de trois coordonnées principales : la pression conjointe d’un certain nombre d’États participants et non participants, la contribution des États méditerranéens non-européens à la Conférence, le contenu de la section de l’Acte final relative à la Méditerranée.
La pression des États méditerranéens européens et non-européens
Une double pression interne et externe à la C.S.C.E. fut à l’origine de l’appel en faveur de la Méditerranée. Bien avant la phase préparatoire de la Conférence, l’Algérie fit savoir de la manière la plus claire, à l’occasion de diverses rencontres diplomatiques bilatérales ou multilatérales (Nations Unies, conférences ministérielles des « 77 » ou des Non-alignés), qu’elle s’estimait directement concernée par la grande négociation paneuropéenne en gestation. Par la suite la Tunisie lui emboîta le pas. Quand en novembre 1972, s’ouvrirent les consultations officieuses de Dipoli (Helsinki), les délégations européennes et nord-américaines se trouvèrent aussitôt saisies d’une déclaration écrite algérienne ainsi que d’un mémorandum tunisien exposant les tenants et aboutissants de l’interdépendance euro-méditerranéenne. Pour suivre le progrès des négociations, l’Algérie et la Tunisie avaient d’ailleurs dépêché sur place, la première une mission de hauts fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères, et la seconde, son ambassadeur en Suède. Les deux pays réclamaient l’insertion d’une dimension méditerranéenne dans le dialogue paneuropéen sur la base de cinq groupes de considérations :
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