J’étais un kamikaze
Qu’un jeune étudiant japonais, contempteur du militarisme nippon, sceptique et quelque peu libertaire s’offre en holocauste à sa patrie perdue, voilà de quoi surprendre les réalistes que nous nous flattons d’être. Il prend néanmoins la peine de nous expliquer pourquoi, pacifiste convaincu, il est devenu pilote de chasse avide d’en découdre, et pourquoi, chevalier du ciel, il a choisi d’être « chevalier du vent divin » voué à la mort inéluctable des « kamikazes ».
Ces mutations ne s’opèrent pas sans déchirements et ce n’est pas sans regrets ni sans désespoir que Nagatsuka fait aux siens le sacrifice d’une vie qu’il nous avoue aimer à passion. Le combat qu’il mène avec lui-même, en lui-même, nous est raconté sans fards, avec une naïveté touchante et parfois sur un ton vocatif que n’eût point renié un héros romantique.
Son journal est illustré d’une relation très précise des péripéties militaires qui consacrent la défaite de son pays. Par souci d’objectivité, il a soin de laisser à ses camarades et à ses chefs la responsabilité de la part historique de son ouvrage. Outre ces notes, utiles à notre connaissance du dernier conflit mondial, le lecteur lira avec un vif intérêt comment le Japon, dans le désarroi de sa chute, formait ses pilotes et utilisait ses avions.
Certes, Nagatsuka, comme tous les rescapés de ce suicide glorieux, ne peut nous dire que ce qu’il aurait pu être, mais il nous dit assez bien ce qu’il n’a pas été. Ses contradictions nous étonnent et leur authenticité nous émeut. ♦