L’idée nationale de la Révolution à nos jours
« Le mot de nationalité a fait plus de ravages que la poudre et les gaz » : cette citation de René Johannet indique l’importance considérable, non pas tant du principe des nationalités, que des conséquences que son affirmation a entraînées dans l’histoire des hommes, spécialement depuis la Révolution française. René Johannet se plaît à opposer Boutroux, qui écrivait : « Le principe des nationalités est une notion très simple et très claire », à Henri Hauser, pour qui « c’est le type d’une fausse idée claire ».
Chacun des éléments de ce principe possède son contraire, tant il est vrai que la « micro-individualité » qu’est aujourd’hui une « nationalité » ne répond pas aux exigences de notre temps des « grands ensembles », pour reprendre une expression de Eisenhower. Mais le problème est faussé par une confusion de vocabulaire. Le principe des nationalités est une chose, la nation en est une autre, et bien des nations sont antérieures à l’affirmation du principe des nationalités, cependant que l’histoire du monde issu du Traité de Versailles montre qu’on peut ne pas supporter la juxtaposition de plusieurs nationalités (ce fut particulièrement net dans l’Europe centrale). Les nations restent l’une des bases fondamentales du monde moderne, quelle que soit l’extension de toutes les données des problèmes politiques, et par conséquent du raisonnement. Le principe des nationalités, quelle que soit la légitimité de certaines revendications, paraît souvent assimilable à un régionalisme en quête d’une justification et d’une forme politiques. Mais il convenait que l’histoire en fût rappelée, et c’est ce que fait très bien Jean-René Suratteau. ♦