Jean Moulin l’unificateur
Cette réédition, revue et complétée, est d’une telle richesse que pour en profiter pleinement il est bon d’avoir déjà une connaissance de base des problèmes complexes de la Résistance française.
Rien ne semblait prédisposer particulièrement Jean Moulin à affronter les dangers de l’action clandestine, mais les événements vont le porter au-delà de son apparence en révélant comme une seconde nature qui lui fera oublier l’angoisse permanente qui est le lot des clandestins. Préfet, il a le sens de l’État, il sera le « grand commis » de la Résistance et il ne fera qu’appliquer les directives du général de Gaulle, en qui il découvre cet homme d’État dont la France a besoin.
L’ouvrage d’Henri Michel retrace à travers les trois missions de Jean Moulin toute l’histoire de notre Résistance. Les rapports entre la France libre et les Mouvements de la zone sud, leur difficulté à se comprendre, la crainte des chefs dont l’autonomie est menacée, tout cela est parfaitement décrit à partir de l’action de Jean Moulin, qui est le seul trait d’union entre Résistance extérieure et Résistance intérieure. La création des Mouvements unis de la Résistance (MUR), de l’Armée secrète, des services communs se fait par lui dans une solitude douloureuse. La crise de croissance et la mutation de la Résistance à la fin de 1942 vont conduire à la création du Conseil national de la Résistance (CNR) qui fait rentrer en scène les partis politiques et les syndicats d’avant-guerre, alors que les Mouvements rêvaient d’une après-résistance différente.
L’arrestation et le martyr de Jean Moulin l’empêchent de terminer l’unification de la zone nord. Sa disparition va créer une situation nouvelle car il ne sera jamais remplacé. Homme de gauche, il possédait la confiance des communistes sans s’être coupé de la droite. Il a réussi à modeler un visage commun aux deux faces extérieure et intérieure d’une Résistance dont il symbolise l’unité dans la dualité. ♦