Le Choc du futur
Ce livre obtient actuellement un grand succès de librairie. Frappé par les bouleversements qu’entraîne chez nos contemporains l’accélération du changement, l’auteur tente d’apporter des solutions à la crise d’adaptation collective du monde actuel. Pour lui la rupture avec le passé est totale. Ce qui marque notre temps c’est l’éphémère, le nouveau et le divers. Nos facultés actuelles d’adaptation ne nous permettent pas de supporter l’instabilité permanente, le renouvellement continu et l’« hyperchoix ». Il nous faut donc pour survivre : régulariser les stimulations qui nous assaillent au moyen d’une éducation appropriée, révolutionner notre enseignement en ne gardant que l’étude des matières susceptibles d’être utiles pour l’avenir et maîtriser la technologie grâce à une planification plus humaine.
Cette thèse, trop rapidement résumée permet à l’auteur d’élaborer une théorie de « prospective sociale » dont les buts sont le changement des attitudes de nos contemporains à l’égard du futur et le contrôle du rythme d’évolution. Que faut-il en penser ?
Autant la description du monde actuel est solidement étayée, autant les projections dans le futur paraissent exagérées voire utopiques. Toffler nous décrit un monde où l’homme sera déshumanisé ou plutôt surhumanisé, donc qui devra avoir changé. Il reste optimiste, car il pense que l’homme gardera le contrôle de la machine, libératrice de toutes les décisions d’ordre mineur. Cependant peut-on croire que cet être en perpétuel déplacement, suractif, sans famille et libéré de tout sentiment soit encore humain et puisse être heureux ?
Pour l’auteur, le choc du futur est si violent qu’il ne peut être « encaissé » par l’homme actuel mais les remèdes proposés pour surmonter la crise paraissent bien légers ! Toffler en est souvent conscient, ainsi avoue-t-il que « l’hyperchoix » offert à l’homme risque d’entraîner l’aliénation de sa liberté !
Le grand mérite de l’auteur est d’avoir fait l’effort d’imaginer un futur qui ne soit pas une simple extrapolation du présent. Ses données de départ sont solides, glanées durant cinq ans le long des universités et des centres de recherche américains. Son érudition est stupéfiante. De plus, Toffler estime qu’avec sa méthode « d’inverser le miroir du temps » on peut, en partant d’une vision cohérente de l’avenir, mieux pénétrer le présent. Finalement cette œuvre de prospective nous oblige à penser dans le futur donc à nous débarrasser des représentations du présent. ♦