Réflexions au bord du gouffre
Ces « réflexions », condensées en douze chapitres, ont une force percutante que la traduction française reproduit fort bien ; on ne s’étonne pas de l’effet que Georg Picht a eu sur ses auditeurs lorsqu’il les a faites à une station de radio de la République fédérale d’Allemagne (RFA). Le sujet est pourtant austère ; mais son intérêt est évident. À quelles conditions le monde peut-il survivre dans l’équilibre, sans aller de lui-même au-devant de catastrophes dont le détail est imprévisible, mais dont le résultat serait certainement la mort de dizaines ou de centaines de millions d’hommes et la disparition de notre civilisation ?
Pour Georg Picht, il est absolument indispensable de dépasser, au plus vite, le stade des États nationaux et de confier à un organisme mondial la charge de mener à bien les tâches indispensables et urgentes : la lutte contre l’explosion démographique, la nourriture des êtres vivants d’aujourd’hui et de demain, la fin des guerres et des armements, la disparition des pollutions. Il faut aussi organiser la science, et non pas la laisser aller au hasard vers de nouvelles découvertes ; donc la planifier en lui fixant ses objectifs, en créant « une science de la science » qui harmoniserait les progrès dans les sciences de la nature et dans celles de l’homme. Il faut discipliner la technologie. Mais aussi et par-dessus tout, il est indispensable de redonner à l’homme un but de vivre et le sens de sa responsabilité, car il est, pour la première fois dans l’histoire, devenu responsable direct de celle-ci. Cette responsabilité doit s’acquérir par « la conjonction de la raison, de la morale et de la religion ».
Ce résumé rapide rend mal compte de la richesse de pensée de ce livre au demeurant très court, qui pourrait servir de « livre de raison » à l’homme de notre temps. ♦