La pensée politique et économique de Teilhard de Chardin
Est-il vraiment possible de dégager de l’œuvre de Teilhard de Chardin un ensemble logique d’opinions sur la politique et l’économie ? Et ne cède-t-on pas au désir de trouver dans les nombreux écrits du père plus de matière qu’il n’en est ? De plus, le postulat de la foi ne conduit-il pas infailliblement, et quelle que soit par ailleurs la sincérité de l’écrivain, tout grand que puisse être son désir d’approfondissement et d’enrichissement, à considérer les faits d’un certain point de vue, excluant pratiquement les autres ?
Toutes questions que ce livre nous semble devoir poser au lecteur. Celui-ci, tout en rendant hommage au travail d’exégèse auquel s’est livré Pierre-Louis Mathieu, à la clarté de son exposé, à la solidité de son raisonnement, risque fort d’aboutir à la conclusion que cette construction est bien fragile. Pouvait-il en être autrement ? Il ne nous le paraît pas. Un homme de l’envergure de pensée de Teilhard de Chardin a obligatoirement abordé pratiquement toutes les questions de notre monde, explicitement ou non. Mais il était pris dans l’événement, qu’il constatait comme un témoin sans pouvoir faire le prophète. Ce n’est point l’abaisser que d’écrire qu’il demeurait un homme au contact des surprises que notre époque impose à tous ceux qui pensent. L’auteur admet qu’il n’existe dans l’œuvre de Teilhard de Chardin aucune doctrine politique et économique. Il faut donc que cette analyse porte sur les réactions d’un grand esprit devant le monde en transformation ; elles sont intéressantes parce que l’œuvre scientifique de Teilhard de Chardin l’incitait, plus qu’aucun autre, à considérer le temps présent, non dans son actualité, mais dans la continuité qu’il offre avec le passé et assure vers l’avenir.
Il nous a semblé que c’était dans cet esprit qu’il convenait de lire ce livre, et non dans l’espoir d’y découvrir une vérité. ♦